Christophe Gleizes, journaliste français spécialiste de football, a été condamné à sept ans de prison ferme en Algérie, notamment pour « apologie du terrorisme », ont annoncé, dimanche 29 juin, Reporters sans frontières (RSF) et son employeur, le groupe So Press, en dénonçant une sanction « injuste ».
« Un appel sera interjeté dès demain, lundi 30 juin », a déclaré RSF, en ajoutant que cette condamnation était intervenue « au terme d’un contrôle judiciaire de treize mois ».
Selon des sources judiciaires contactées par l’Agence France-Presse en Algérie, le journaliste a été conduit directement à la prison de Tizi Ouzou après sa condamnation en première instance. Une fois qu’il aura fait appel, il devrait être rejugé, mais pas avant la prochaine session criminelle qui s’ouvrira en octobre, selon les mêmes sources.
Journaliste indépendant âgé de 36 ans, collaborateur des magazines So Foot et Society, qui appartiennent au groupe So Press, Christophe Gleizes s’est rendu en Algérie en mai 2024, notamment pour un sujet sur le club de la Jeunesse Sportive de Kabylie. Selon RSF, il a été arrêté le 28 mai 2024 à Tizi Ouzou et placé sous contrôle judiciaire pour « être entré dans le pays avec un visa touristique, pour “apologie du terrorisme” et “possession de publications dans un but de propagande nuisant à l’intérêt national” ».
« Ces dernières accusations, sans fondement et totalement réfutées, sont dues au fait que le journaliste avait eu des contacts, en 2015 et 2017, avec le responsable du club de football de Tizi Ouzou, par ailleurs responsable du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK), classé organisation terroriste par les autorités algériennes en 2021 », poursuit l’ONG de défense de la presse.
« Rien n’échappe à la politique »
Les deux premiers échanges entre les deux hommes « ont eu lieu bien avant cette catégorisation par les autorités algériennes », souligne RSF. « Le seul échange survenu en 2024 visait à la préparation de son reportage sur le club de football, la JSK, ce dont Christophe Gleizes ne s’est jamais caché », poursuit l’ONG. « Sa condamnation à sept ans de prison n’a aucun sens et ne démontre qu’un fait : rien n’échappe à la politique aujourd’hui et la justice algérienne a manqué une importante occasion de sortir par le haut dans cette affaire », s’est indigné le directeur général de RSF, Thibaut Bruttin.
« Il est important que tout soit mis en œuvre, y compris politiquement et diplomatiquement, pour que la justice l’emporte et que Christophe puisse retrouver ses proches et sa rédaction », a pour sa part plaidé le fondateur de So Press, Franck Annese, cité dans le communiqué.
La condamnation du journaliste intervient dans un contexte de crise aiguë entre l’Algérie et la France, marquée par des expulsions de diplomates de part et d’autre et un gel de toutes les coopérations. La brouille a éclaté l’été dernier après la reconnaissance par le président français, Emmanuel Macron, d’un plan d’autonomie « sous souveraineté marocaine » pour le Sahara occidental, territoire que se disputent depuis 50 ans le Maroc et les indépendantistes du Polisario, soutenus par Alger.
La situation s’est envenimée avec l’arrestation, à la mi-novembre, de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, accusé d’avoir porté atteinte « à l’unité nationale » en estimant que l’Algérie avait hérité sous la colonisation française de territoires appartenant jusque-là au Maroc. Après une condamnation à cinq ans de prison en première instance, le verdict en appel doit être annoncé mardi prochain.