En politique, établir un parallèle avec une icône unanimement respectée vaut souvent mieux qu’un long argumentaire. Le premier ministre australien, Anthony Albanese, a ainsi fait mouche, samedi 5 juillet, alors que le débat fait rage dans son pays sur l’avenir des relations de Canberra avec les Etats-Unis, avec la Chine et avec l’Europe.
M. Albanese rendait hommage à son lointain prédécesseur John Curtin, travailliste comme lui, à l’occasion du 80e anniversaire de sa disparition. Le 27 décembre 1941, trois semaines après l’attaque de Pearl Harbor et en pleine guerre du Pacifique, Curtin avait publié dans le Melbourne Herald un article resté célèbre dans lequel il plaidait pour que l’Australie « se tourne vers l’Amérique », une façon, en réalité, de ne pas laisser son destin aux mains de Churchill. En février 1942, il avait tenu tête au premier ministre britannique, qui prétendait disposer des troupes australiennes pour les envoyer en Birmanie, et avait exigé leur retour pour défendre l’Australie.
Ce que voulait dire Curtin, analyse aujourd’hui Albanese, c’était que « le destin de l’Australie se déciderait dans [leur] région. C’était une guerre du Pacifique. [Leur] sécurité ne pouvait pas être sous-traitée à Londres, ni reposer sur de vagues assurances de la Grande-Bretagne ».
Remplacez « Londres » par « Washington » et le message est assez clair. Anthony Albanese, largement réélu en mai contre un adversaire conservateur qui se targuait d’avoir de bonnes relations avec Donald Trump, n’apprécie pas les diktats du 47e président des Etats-Unis. Dans ce pays-clé pour le dispositif américain dans l’Indo-Pacifique, comme au Japon, le doute sur la solidité de l’alliance avec Washington éclate aujourd’hui au grand jour.
Trump traite ses alliés de l’Indo-Pacifique comme ceux de l’Europe : par l’intimidation et le chantage, sur le plan militaire avec des mises en demeure, comme sur le plan commercial avec la guerre des droits de douane. Et ces méthodes produisent le même résultat : la rupture de la confiance.
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