Les bords du lac Michigan évoquent Marioupol, ville portuaire de l’est de l’Ukraine, sur la mer d’Azov. C’est du moins ce qu’a ressenti Kseniia Levchenko en découvrant Chicago (Illinois). Cette Ukrainienne, qui vient de fêter ses 28 ans, a fui, il y a deux ans, sa ville détruite et occupée par l’armée russe. Un missile avait éventré l’immeuble où elle vivait, sa belle-mère n’a pas survécu à l’hiver glacial dans les caves. La jeune femme arrive en Allemagne, dans un camp de réfugiés près d’Augsbourg, avec son mari, Oleksii. Ils ont alors l’idée de poster une vidéo de SOS sur Facebook et Instagram. Petit miracle : un Américain répond, fermier du Dakota du Nord, qui les aidera par « charité chrétienne ».
C’est ainsi que fonctionne le programme Uniting for Ukraine, mis en place sous Joe Biden, dès avril 2022, deux mois après le début de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie : tout citoyen américain peut parrainer une famille ukrainienne pour qu’elle s’installe aux Etats-Unis durant deux ans et puisse demander un permis de travail. Plus de 240 000 Ukrainiens en ont bénéficié, dont une large partie à Chicago, qui abrite la deuxième communauté ukrainienne du pays, après New York.
Kseniia Levchenko l’ignorait. Arrivée à Chicago, elle découvre l’Ukrainian Village, le paisible quartier historique qui accueille les vagues d’immigrés ukrainiens depuis la fin du XIXe siècle. Elle se fait embaucher comme administratrice du Musée national ukrainien, au cœur de cet îlot pavoisé de bleu et jaune, tandis que son mari est recruté en tant que chimiste dans un laboratoire en contrat avec le ministère de la défense. La vie reprend, coupée d’une famille qui, dans les territoires sous domination russe, affirme que l’occupation est un « mal nécessaire ». Et puis… « Un jour nous étions légaux, un autre nous sommes illégaux », dit en soupirant Kseniia Levchenko, dont le permis de travail expire en août.
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