Des corps sont empilés, à même le sol, dans des chambres de l’hôpital national de Souweïda, dans le centre de la ville à majorité druze du Sud syrien. D’autres sont alignés dans les couloirs souillés de sang. L’authenticité des scènes qui apparaissent dans deux vidéos, filmées mercredi 16 juillet, a été confirmée au Monde par Kamal, un médecin druze de l’hôpital. Son prénom, comme celui de tous les témoins cités, a été modifié, par souci de sécurité. La ville, encerclée, est coupée de l’extérieur et inaccessible. Prise au milieu des combats qui ont opposé en ville, de mardi à jeudi, les forces gouvernementales, appuyées par des combattants tribaux, aux factions druzes, l’équipe médicale a dû opérer sans électricité, sans eau, et avec ce qu’il restait de fournitures médicales.
« La plupart des corps sont ceux de civils. Nous n’avions plus d’endroit où les mettre. Depuis, leur nombre a encore augmenté. Il y en a au moins 200, peut-être 300, dont au moins 21 femmes et 45 enfants », assure Kamal, joint au téléphone, jeudi soir. Ils ont été victimes de tirs d’artillerie, de tirs de snipers, et pour certains d’exécutions sommaires. Le médecin accuse les forces gouvernementales, qui ont pris le contrôle du quartier mercredi, d’avoir attaqué l’hôpital avant de se retirer de Souweïda à minuit. « Elles ont mis deux tanks devant l’hôpital et ont commencé à nous bombarder jusqu’à ce qu’un tir de RPG détruise un tank », affirme le médecin.
« Tous ceux qui essayaient d’amener des blessés à l’hôpital étaient visés par les tanks et des snipers. Les soldats nous ont dit : “Si vous quittez la pièce, vous allez vous faire tirer dessus. Si vous cachez quiconque, on vous exécutera.” Ils nous ont demandé si l’on était druzes ou musulmans », poursuit Kamal. Il affirme qu’un jeune homme qui aidait le personnel médical a été abattu parce qu’il tenait tête aux soldats. Deux médecins, Faten Hilal et Talaat Fawzi Amer, ont été tués par des snipers près de l’hôpital.
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