Ce soir d’automne 1980, au London Palladium, salle de spectacle de la capitale britannique, le comédien américain Larry Hagman est présenté à la reine mère. Un honneur. Pour lui, mais aussi pour elle. La veuve du roi George VI, mère d’Elizabeth II, est ravie de le rencontrer. Elle lui pose la question qui lui brûle les lèvres : « Qui a tiré sur JR ? »
Gentleman, l’Américain s’excuse platement. Il doit garder le secret, même devant une personne d’un tel rang. Il a l’habitude de cette question. Depuis des mois, elle lui est posée où qu’il aille. Qui a tiré sur le personnage de J. R. Ewing, milliardaire sans scrupule, qu’il interprète dans la série Dallas ? Qui a appuyé deux fois sur la gâchette et l’a laissé pour mort dans le couloir qui jouxte son bureau dans la propriété familiale ?
Les spectateurs du dernier épisode de la troisième saison, diffusé sur la chaîne américaine CBS le 21 mars 1980, n’ont vu que la main tenant l’arme et, depuis, ils s’interrogent. Ils devront patienter huit mois pour que, le 21 novembre de la même année, au quatrième épisode de la quatrième saison, ils aient la réponse.
« L’attente qui a précédé le dénouement et l’épisode révélant l’identité du tireur ont été un véritable phénomène de société, explique Marjolaine Boutet, professeure de civilisation américaine à l’université Sorbonne-Paris Nord et spécialiste des séries. C’est à ce moment précis que Dallas est vraiment entré dans l’histoire. Il ne s’agit évidemment pas de la première série télévisée à succès, mais de la première à déclencher de telles passions. »
Les spectateurs se perdent en conjectures
Diffusée à partir d’avril 1978, Dallas est écrit par le scénariste David Jacobs. Le patron de CBS lui a demandé d’imaginer un feuilleton se déroulant dans les sphères huppées du Sud américain et non dans la Californie de la classe moyenne chère aux fictions.
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