Ce n’est plus le Léon Marchand comblé du milieu de semaine, celui qui vient de raboter le record du monde du 200 m 4 nages. Quand il se présente face aux quelques journalistes français présents à Singapour, dimanche 3 août, le Toulousain apparaît quelque peu tracassé. Lors des séries du 400 m 4 nages, dont il va disputer la finale dans la soirée (13 h 59 heure de Paris), il ne s’est qualifié qu’avec le 7ᵉ temps (4 min 13 s 19). Loin de son record du monde (4 min 2 s 50) et avec seulement huit dixièmes d’avance sur le premier éliminé.
Depuis les tribunes, la question s’est posée : le quadruple médaillé d’or aux Jeux de Paris 2024 était-il en gestion ou dans le dur ? La réponse n’a pas tardé à fuser. « Ce n’était pas volontaire. J’aurais préféré faire le meilleur temps ce matin, mais ça ne s’est pas passé comme prévu. J’étais un peu dans le dur. Il n’y a pas que les jambes qui sont lourdes (…) Oui, ça m’inquiète. J’ai eu de la chance ce matin, mais j’ai une ligne ce soir, donc ça passe », assure-t-il. Et d’annoncer son programme d’avant-finale : sieste et récupération.
Pour le dernier jour des Mondiaux de natation de Singapour, la grisaille et la pluie se sont abattues sur la cité-Etat asiatique et toutes deux semblaient s’être glissées jusque dans les coursives de la piscine. La matinée fut décevante pour Léon Marchand, qu’en sera-t-il de sa soirée ? En plus de la finale du 400 m 4 nages, où il visera son septième titre mondial en individuel et en grand bassin, le nageur de 23 ans va disputer la finale du relais 4 × 100 m 4 nages, à peine trente minutes plus tard.
« J’ai envie de faire les deux, même si physiquement, ça ne va pas être facile », reconnaît le Toulousain, qui sera aligné en brasse, aux côtés de Yohann Ndoye Brouard (dos), Maxime Grousset (papillon) et Yann Le Goff (crawl). Mais sera-t-il en mesure de tenir la distance ? Mercredi, dans l’euphorie de son record du monde, son entraîneur Nicolas Castel s’était émerveillé de la performance, avant d’avertir : « Maintenant, il faut voir si la somme de travail réalisée cette année est suffisante pour terminer la semaine. »
Une préparation « un peu plus chaotique »
Comme pléthore d’autres nageurs en année post-olympique, la saison de Léon Marchand n’a pas été la plus studieuse en termes de préparation. Il a pris des vacances, voyagé en Asie, s’est entraîné en Australie, s’y est beaucoup amusé aussi, avant de rejoindre, en avril seulement, son coach américain Bob Bowman à Austin (Texas). « J’ai commencé à travailler dur assez tard cette année. Forcément, il y a eu la question de savoir si je me mettais à 100 % pour les championnats du monde », assurait-il avant le début de la compétition.
Il s’est par ailleurs blessé à deux reprises – l’épaule en décembre, une côte en février. « C’était un peu plus chaotique cette année pour lui », reconnaît Denis Auguin, le directeur technique national de la Fédération française de natation, loin de s’alarmer néanmoins de la performance de Léon Marchand lors des séries dimanche : « J’ai trouvé ça un peu trop relâché, mais pas d’inquiétude. »
L’entrée en lice de Léon Marchand aux Mondiaux n’a pas non plus été de tout repos, le Français ne parvenant pas à trouver le sommeil après son record du monde du 200 m 4 nages, avant de vivre le lendemain la « tension nerveuse d’une finale, qui crée de la fatigue physique », selon Denis Auguin. Le Toulousain a aussi lâché quelques forces dans la finale du relais 4 × 200 m nage libre, vendredi, que la France a terminé à la 6ᵉ place.
Surtout, Léon Marchand s’aventure en eau inconnue lors de cette dernière soirée singapourienne. Il maîtrise à la perfection le 400 m 4 nages, mais va découvrir la distance à la fin d’une semaine de compétition. Car les organisateurs des championnats du monde ont décidé cette année d’inverser le calendrier : aux Mondiaux de Budapest, en 2022, à ceux de Fukuoka (Japon) en 2023, puis aux Jeux de Paris, le Français avait lancé sa razzia de médailles en remportant le 400 m 4 nages.
Battu une seule fois sur 200 m 4 nages depuis 2021
« Faire un 400 m 4 nages en fin de semaine, en ayant fait beaucoup de courses, n’est pas la même que lors du premier jour où il est frais », assure Denis Auguin. Outre la volonté de battre le record du monde du 200 m 4 nages, cet ajustement calendaire explique également le choix de Léon Marchand de faire l’impasse, à Singapour, sur le 200 m papillon et le 200 m brasse, dont il est pourtant champion olympique.
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« J’ai moins de courses que d’habitude, donc j’espère que je vais arriver plus frais que d’habitude. (…) Je sais que j’ai gagné beaucoup de puissance [cette année], mais je ne sais pas si j’ai gagné beaucoup d’endurance, donc on verra sur le 400 m 4 nages », prévenait, à la veille des Mondiaux, le Toulousain, qui n’a été battu qu’une fois sur cette distance en finale – à Fort Lauderdale (Floride), en mai dernier – depuis sa 6ᵉ place aux Jeux de Tokyo 2021.
Depuis plusieurs jours, certains observateurs s’emploient à convertir sur 400 m 4 nages le record du monde de Léon Marchand datant de mercredi. La légende américaine Michael Phelps a depuis longtemps prophétisé que le Français serait le premier à passer sous la barre des quatre minutes sur cette distance. Après sa performance timide de la matinée, la priorité de Léon Marchand sera surtout de remporter un nouveau titre de champion du monde.