Le destin d’Altice France est au moins en partie scellé. Le tribunal des activités économiques de Paris a approuvé, lundi 4 août, l’accord sur la restructuration de sa gigantesque dette.
Dans sa décision, le tribunal n’a pas suivi les réquisitions du ministère public, qui avait demandé l’exclusion de trois filiales du groupe dont l’opérateur SFR, à l’unisson des demandes des syndicats.
Au terme d’un bras de fer de plusieurs mois, le groupe du milliardaire Patrick Drahi avait annoncé, en février, être parvenu à un accord avec ses créanciers pour alléger sa colossale dette de 24,1 milliards d’euros. D’après les termes de l’accord, les créances du groupe doivent être réduites de plus de 8 milliards, pour atteindre 15,5 milliards d’euros.
Lors de l’audience relative à la sauvegarde accélérée, le 22 juillet, le ministère public avait requis l’adoption du plan, mais avait demandé que trois des sociétés du groupe, SFR, SFR Fibre et Completel (branche dédiée aux entreprises), en soient exclues. De quoi remettre en question son équilibre : pour la direction de l’entreprise, l’accord devait inclure toutes les sociétés du groupe. Une décision – même en partie – défavorable aurait pu anéantir la future transaction.
« Le succès de la négociation ou la fin de l’histoire »
Pour le comité social et économique (CSE), qui a refusé de rendre un avis sur le plan de sauvegarde accélérée, les sociétés du groupe, et notamment SFR, « rentables et solides financièrement (…) ont été intégrées de force dans un schéma d’endettement dont elles ne tirent aucun bénéfice ». « Ces filiales-là ne sont pas endettées, n’ont jamais souscrit de crédit auprès des créanciers avec qui cet accord a été passé, mais c’est tout de même nous qui sommes garants du remboursement de ces dettes et qui ferons les frais du remboursement », a affirmé Olivier Lelong, délégué syndical central CFDT.
Le groupe, de son côté, a réaffirmé l’importance de cette réduction de dette record pour l’avenir de l’entreprise, et craint de se retrouver dans sa position prénégociation, avec une dette colossale qui menace sa viabilité. « L’équation était simple : le succès de la négociation ou la fin de l’histoire », avait martelé la direction d’Altice France, qui rappelle avoir obtenu l’accord de la totalité des créanciers.
Tandis que les représentants du personnel voient dans le plan de sauvegarde un « projet de démantèlement » qui aboutira à la vente des filiales et à des suppressions d’emplois, la direction qualifie l’opération d’« exclusivement financière, sans aucun impact sur la vie opérationnelle, commerciale, sociale, du groupe ».
Discret face aux rumeurs d’un potentiel rachat de SFR, le PDG d’Altice France, Arthur Dreyfuss, avait assuré à la sortie de l’audience de juillet qu’il n’y avait « pas de processus de vente de SFR en cours, et [qu’]aucune offre, pas même indicative et sans valeur, n’a[vait] été reçue à date ». Les concurrents de l’opérateur, favorables à un passage de quatre à trois acteurs sur le marché français, se sont néanmoins déjà exprimés sur le sujet. « Il y a évidemment des discussions préliminaires entre les opérateurs », a affirmé, mardi, le directeur financier d’Orange, Laurent Martinez, à l’occasion de la présentation des résultats semestriels du groupe.