« Que Dieu te protège mon frère. Je ne peux pas décrire à quel point tu me manques. » Le 1er juillet, c’est par une vidéo publiée sur Instagram que Ahmad Abou Hatab fait ses adieux à son frère. Ismail a été tué la veille par un bombardement israélien sur le café Al-Baqa, à Gaza. Sur l’écran, des images du photojournaliste et réalisateur de 32 ans, qui joue avec sa perruche, prépare du café, se filme dans les décombres ; puis la vidéo insoutenable de son corps sans vie, embrassé par ses proches.
Des centaines d’autres publications et de commentaires lui rendent hommage. Comme pour de nombreux Palestiniens tués à Gaza, le compte Instagram d’Ismail est devenu un lieu de mémoire numérique. Et, malgré sa disparition, son compte reste actif, alimenté par Ahmad. « Pouvoir récupérer son compte, c’était une petite victoire. Comme s’il nous disait : “Je suis encore là” », confie le jeune homme de 26 ans, bloqué à l’étranger depuis la fermeture des frontières de l’enclave par Israël.
En 2023, après avoir été grièvement blessé lors d’une première frappe, Ismail lui avait confié ses identifiants. Aujourd’hui, il s’en sert pour promouvoir l’exposition itinérante que son frère préparait avec la dessinatrice Frans Al-Salmi, tuée avec lui. Pour Ahmad, poster représente aussi un « acte de loyauté ». « Aucun réseau social ne peut contenir la profondeur de ce deuil. Mais, pour nous, Instagram est devenu une manière de nous assurer que le nom d’Ismail Abou Hatab ne soit pas réduit à un nombre. Ce n’est pas un outil pour guérir, mais un outil pour être témoin. »
Il vous reste 71.65% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.