Si elle était placée à n’importe quel autre endroit de Paris, cette statue équestre attirerait les regards. Mais ici, perdue sur le parvis de Notre-Dame, c’est à peine si on y prête attention. Charlemagne et ses leudes, sculpture en bronze de Charles (1819-1900) et Louis Rochet (1813-1878), a beau mesurer sept mètres de haut et être posée sur un solide piédestal, l’ensemble paraît minuscule, comme écrasé par la cathédrale. Rares sont les touristes qui s’y attardent vraiment. D’ailleurs, rien n’est fait pour que cela change : posée sans décorum particulier, la statue semble être arrivée là presque par hasard. Pourtant, elle ne manque pas d’intérêt.
Avec ses innombrables anachronismes, l’œuvre n’a rien de réaliste. En revanche, tous les symboles y sont. L’empereur (né entre 742 et 748, et mort en 814) y est représenté à cheval, comme un chef guerrier. Il est coiffé de la couronne impériale, une pièce réalisée au XIIe siècle, et muni du sceptre qui sera façonné pour le roi Charles V, dans la deuxième moitié du XIVe siècle. A côté de lui sont représentés deux de ses « leudes », ses plus proches compagnons, Olivier et Roland.
Or, tous les écoliers de France et de Navarre savent que ce dernier a trouvé la mort à Roncevaux (actuelle Espagne) en 778, alors que le roi Charles était encore bien loin de pouvoir aspirer à l’empire. Pis encore, l’empereur porte une longue barbe, alors qu’on sait depuis bien longtemps que sa « barbe fleurie » n’est qu’une légende pour enfants.
Il vous reste 92.69% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.