Il fait nuit, et un petit crachin trempe le quai du port de Lorient (Morbihan). Dans les hangars froids de la criée, les premiers travailleurs sont déjà à pied d’œuvre. Des manutentionnaires préparent les lignes de convoyage, prêtes à recevoir la pêche du jour. Dehors, l’équipage du chalutier Côte-d’Ambre s’apprête, lui, à partir pour dix jours en mer. D’avril à fin août, c’est la période des langoustines. « Bouba n’est pas là, alors que d’habitude c’est le premier arrivé », s’étonne le patron du navire, Laurent Tréguier, 52 ans, en terminant le plein de carburant. Le matelot retardataire finit par apparaître, contrarié par une panne de réveil. D’un pas pressé, Bouba Diouf Sagna, 47 ans, prend sa place aux côtés de ses quatre collègues, dans l’exécution des tâches routinières qui précèdent le départ en mer. A 3 heures du matin, ils doivent quitter le port.
Voilà plus de cinq ans que cet homme originaire de Bétanti, une commune littorale au sud du Sénégal, a rejoint l’équipage du Côte-d’Ambre. « Ça fait une quinzaine d’années qu’on est en tension sur le personnel parce que le métier n’attire plus. C’est physique, et le confort est relatif, explique Laurent Tréguier. On arrivait quand même à trouver des gars, plus ou moins formés, mais, quand on a acheté le bateau en 2019 avec mon frère, on a eu besoin de tourner davantage, donc de recruter. J’ai vu que des Sénégalais longeaient les quais avec des CV, j’ai d’abord embauché Doudou. Il naviguait déjà en France depuis plusieurs années. »
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