- Méconnues et sous-estimées, les allergies professionnelles bouleversent le quotidien de nombreux Français.
- C’est un boulanger devenant allergique à la farine ou encore une coiffeuse soudainement intolérante à tous les shampoings et teintures.
- Regardez ce reportage du JT de TF1.
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Le 13H
On a parfois tendance à l’oublier, mais une allergie quelconque peut se déclarer à n’importe quel moment, chez tout un chacun. Auquel cas, c’est un problème à l’échelle de la sphère privée, mais peut-être plus encore s’agissant du milieu professionnel, ces affections pouvant nécessiter un aménagement de poste, un reclassement, voire une reconversion. Le phénomène reste difficile à quantifier, nombre de salariés n’osant pas déclarer pareille pathologie de peur de perdre leur emploi, mais selon l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), organisme de référence dans les domaines de la santé au travail et de la prévention des risques professionnels, il reste très largement sous-évalué.
Le reportage du JT de 13H de TF1 visible en tête de cet article présente d’abord le cas de Mathias Klein, boulanger de profession et allergique à la farine depuis dix ans. « La farine, c’est comme les poussières banales qu’on trouve à l’extérieur, c’est très volatile, on continue à en avoir sur nous, dans nos cheveux. Très récemment, j’ai développé de l’asthme. Et ça empire de jour en jour »
, explique-t-il derrière son masque chirurgical. Au cours de sa carrière, près d’un boulanger sur trois déclare de l’allergie liée à son métier. Une proportion beaucoup trop élevée pour être ignorée par les employeurs.
Quand j’ai perdu la peau de mes paupières, on a vraiment commencé à s’inquiéter
Quand j’ai perdu la peau de mes paupières, on a vraiment commencé à s’inquiéter
Eva Biersohn, coiffeuse
Alors de plus en plus de boulangeries, comme l’Instant Thé à Brumath (Bas-Rhin), celle où travaille Mathias, adaptent leur matériel en conséquence. « Traditionnellement, lorsqu’on fleure un bac, on prend la farine dans une main et on la projette comme ça, ce qui génère un nuage de poussière. Mais maintenant, cette machine, lorsqu’on pousse le bac, nous permet de faire tomber un rideau de farine sans projection »
, montre José Arroyo, président de la Fédération de la boulangerie-pâtisserie du Bas-Rhin, qui a aussi investi dans une farine moins volatile. Des dépenses indemnisées par l’Assurance maladie à hauteur de 70%. « Ça vient aussi régler une problématique d’absentéisme, sachant qu’on a déjà un peu de mal à recruter »
, ajoute l’artisan.
Autre cas : celui de la coiffeuse Eva Biersohn, le métier dont elle a toujours rêvé, mais qu’elle a failli devoir arrêter d’exercer il y a sept ans, quand elle s’est retrouvée allergique à presque tous les shampoings et toutes les teintures qu’on trouve sur le marché, après dix ans de carrière. « Moi, ça a commencé par des démangeaisons au niveau des mains. Ensuite, j’ai perdu la peau de mes paupières et là, on a vraiment commencé à s’inquiéter. Après, ça a touché les poumons »
, détaille celle qui a dû quitter son emploi neuf mois après les premiers symptômes, ce qu’elle dit avoir « vécu comme un échec ».
Depuis, la jeune femme a rebondi en créant, avec un certain succès, son propre salon, où elle a délaissé toutes les substances chimiques provoquant ses réactions allergiques, au profit de produits 100% naturels. Attention, cependant : « Par souci écologique, on constate une poussée de produits d’origine naturelle dans de nombreux domaines et en particulier dans le domaine de la beauté. Or, il est important de garder à l’esprit qu’une substance, qu’elle soit synthétique ou naturelle, peut présenter des dangers. Certaines huiles essentielles, par exemple, peuvent être à l’origine d’allergies cutanées potentiellement très invalidantes »,
prend soin d’avertir Annabelle Guilleux, experte d’assistance-conseil à l’INRS, sur le site de l’organisme (nouvelle fenêtre).
On distingue deux grands types d’allergies professionnelles : les allergies cutanées (eczéma, urticaires de contact et dermatites de contact aux protéines) et les allergies respiratoires (des asthmes ou des rhinites allergiques). Quant aux corps de métier impactés, ils sont très, très nombreux. Outre les boulangers et les coiffeurs, on peut citer, pêle-mêle, les peintres (vernis, solvants), les menuisiers (poussière de bois), les éleveurs ou les vétérinaires (poils ou plumes d’animaux), les femmes et hommes de ménage (désinfectants de surface), les maçons (ciments), les cultivateurs (pesticides), les personnels soignants (latex des gants, antiseptiques), les salariés de l’industrie plastique et du caoutchouc… Entre autres.