La campagne électorale s’achève, deux jours avant l’élection présidentielle du 28 juin organisée en urgence après le décès d’Ebrahim Raissi dans un accident d’hélicoptère, en mai. Mais contrairement aux scrutins précédents de 2021 et 2024, largement ignorés par les Iraniens, celui-ci pourrait attirer davantage d’électeurs. Selon le dernier sondage en date du 24 juin de l’IPSA, un institut proche du gouvernement, plus de 52 % des électeurs pourraient se rendre aux urnes.
L’intérêt renouvelé pour cette élection s’explique en partie par la présence du candidat réformateur Masoud Pezeshkian, le seul parmi les cinq autres candidats validés par le Conseil des gardiens de la Constitution. Interrogés par Le Monde, des experts et des électeurs joints par téléphone notent que sa candidature suscite un espoir de meilleure conduite des affaires nationales, et même d’une légère amélioration économique, face à une inflation galopante de 53 %, attribuée à une mauvaise gestion et aux sanctions internationales. Ces dernières années, le camp réformateur a été marginalisé et écarté par le régime.
Parmi les cinq candidats conservateurs en lice, Mohammad Bagher Ghalibaf, ancien maire de Téhéran, et Saïd Jalili, ex-négociateur sur le dossier nucléaire avec l’Occident, arrivent en tête des sondages aux côtés de Masoud Pezeshkian. A ce stade, aucun ne semble cependant pouvoir remporter une majorité absolue dès le premier tour. Certains experts et militants politiques spéculent sur la possibilité que Saïd Jalili, connu pour ses positions rigides et idéologiques, se retire en faveur de Mohammad Bagher Ghalibaf, technocrate soutenu par les gardiens de la révolution, l’armée idéologique du pays.
Quel que soit le candidat conservateur choisi, leur base électorale, historiquement plus proche du Guide suprême, Ali Khamenei, que des réformateurs, reste constante. Mais une participation électorale plus élevée a souvent bénéficié au camp réformateur en Iran. Cependant, le défi reste grand pour ce dernier, car peu d’Iraniens pensent que le système est réformable, et les blessures de la répression violente du mouvement de protestation « Femme, vie, liberté », né après la mort en détention de la jeune Mahsa (Jina) Amini en septembre 2022, restent vives.
« Désespoir collectif »
À Téhéran, Pouya (le prénom a été modifié pour des raisons de sécurité) discute avec ses amis abstentionnistes de la nécessité d’aller voter, alors qu’il avait boycotté les élections de 2021 et de 2024. Agé de 35 ans, ingénieur travaillant dans une usine, il avait pris part aux manifestations du mouvement « Femme, vie, liberté » et continue à exprimer son mécontentement envers le régime sur les réseaux sociaux. « Je vais voter pour Pezeshkian parce que je suis fatigué de ce désespoir collectif qui nous étouffe depuis la mort de Mahsa Amini, explique-t-il. A ce stade, le renversement de ce régime est impossible, en partie en raison de l’absence d’une opposition structurée et efficace. De plus, le boycott des élections n’a eu aucun effet. »
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