Six semaines après avoir embrassé à Moscou Vladimir Poutine, qualifiant le président russe d’« ami le plus cher », au moment précis où les forces russes bombardaient un hôpital pour enfants en Ukraine, Narendra Modi a étreint, vendredi 23 août, Volodymyr Zelensky, devant le palais présidentiel à Kiev. Le premier ministre indien est arrivé en train de Pologne, où il a été reçu par son homologue Donald Tusk durant deux jours.
L’événement revêt un caractère historique, car il s’agit de la première visite d’un chef de gouvernement indien depuis l’indépendance de l’Ukraine en 1991, mais il a surtout valeur de réparation. L’image du premier ministre indien avait été sérieusement écornée par son séjour russe, et ses appels à la paix n’avaient rien changé. Le président ukrainien avait réagi en évoquant une « une énorme déception et un coup dévastateur pour les efforts de paix de voir le dirigeant de la plus grande démocratie du monde étreindre le criminel le plus sanguinaire du monde à Moscou ». Les Américains avaient également exprimé leur désapprobation.
Ce faux pas avait sérieusement mis en péril le jeu d’équilibriste joué par l’Inde depuis le début de la guerre, consistant à ne pas prendre position pour ne froisser ni son partenaire russe historique, principal fournisseur d’armes et allié indispensable face au rival chinois, ni les Occidentaux, alliés de l’Ukraine. Depuis le début de l’invasion en février 2022, malgré les pressions occidentales, l’Inde s’est systématiquement abstenue de voter les résolutions des Nations unies condamnant la Russie. Elle a d’ailleurs toujours refusé de désigner l’agresseur. Ignorant les pressions des Américains et des Européens, New Delhi a considérablement augmenté ses achats de pétrole à bas prix aux Russes, qui contribuent à financer l’effort de guerre de Moscou, comme l’a souligné Zelensky lors de leur entretien.
Plaidoyer pour un dialogue
Pour réparer les dégâts, le président ukrainien et le premier ministre indien ont honoré la mémoire des enfants tués dans le conflit, en visitant un mémorial qui leur est dédié. Les deux hommes ont déposé des ours en peluche et observé une minute de silence. Modi, coutumier des grandes embrassades, a pris son homologue par l’épaule. « Les conflits sont particulièrement dévastateurs pour les jeunes enfants, a écrit Modi dans un message publié sur X. Je suis de tout cœur avec les familles des enfants qui ont perdu la vie et je prie pour qu’elles trouvent la force de surmonter leur chagrin. » Voilà pour l’image.
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