Par son style, ses origines, l’enthousiasme qu’elle a suscité depuis son entrée en campagne, Kamala Harris s’inscrit en rupture avec Joe Biden. En revanche, en politique étrangère, la continuité entre le président et sa vice-présidente semble complète. Il suffisait d’écouter sur ce point le discours de la candidate devant les délégués démocrates à Chicago, le 22 août. Et particulièrement le passage, pesé au trébuchet, consacré à la guerre à Gaza.
Kamala Harris a rappelé les efforts incessants de l’administration pour pousser Israël et le Hamas à un cessez-le-feu, conduisant à une libération des otages encore détenus dans le territoire enclavé et supplicié. C’est la condition, selon elle, pour que les Palestiniens « réalisent leur droit à la dignité, à la sécurité, à la liberté et à l’autodétermination ». Ce dernier principe est aujourd’hui nié et rejeté par le gouvernement israélien, dominé par l’extrême droite suprémaciste.
Mais la candidate n’a pris aucune distance avec ce partenaire si peu fiable qui abuse du soutien inconditionnel des Etats-Unis. Kamala Harris n’a fait aucune référence à une éventuelle suspension des livraisons d’armes offensives à Israël, réclamée par de nombreux militants démocrates dans des Etats à forte communauté arabo-musulmane.
« Immense disparité »
Plus de 700 000 participants aux primaires démocrates – avant le retrait de Joe Biden – avaient décidé d’effectuer un vote protestataire, en se déclarant non engagés (uncommitted) en faveur d’un candidat. Il s’agissait d’un avertissement clair adressé à l’administration, une façon de critiquer son soutien trop unilatéral au gouvernement de Benyamin Nétanyahou. Ce mouvement parti de la base et organisé par des élus locaux, qui a gagné différents Etats comme le Michigan, le Wisconsin ou le Minnesota, est parvenu à obtenir vingt-neuf délégués à la convention démocrate. Pourtant, les organisateurs de la convention ont refusé de donner le micro, à la tribune principale, à un représentant de ce mouvement, au nom des civils palestiniens.
En revanche, Rachel et Jon Polin, parents de Hersh, otage de 23 ans détenu à Gaza, ont pu livrer un témoignage bouleversant sur scène. A leur grande surprise, comme ils l’ont reconnu par la suite, ils ont été vivement applaudis. « Dans une compétition de souffrance, il n’y a pas de vainqueurs », ont-ils dit.
D’autres orateurs, comme le sénateur Bernie Sanders, figure historique de la gauche du parti, ont aussi fait référence à la guerre, mais en des termes assez convenus. Le Parti démocrate a organisé sa convention en veillant scrupuleusement à son unité autour de Kamala Harris. Il a été conforté dans cette discipline, quitte à mépriser la tragédie gazaouie, par le faible succès des manifestations de solidarité organisées à Chicago en marge de l’événement politique.
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