Son arrestation à l’aéroport du Bourget, samedi 24 août au soir, avait provoqué la stupeur. Au terme d’une garde à vue de plus de 80 heures – la durée applicable aux infractions liées à la criminalité organisée étant étendue à 96 heures –, le patron de la messagerie Telegram, Pavel Durov, a été mis en examen mercredi 28 août de l’ensemble des douze infractions visées au réquisitoire introductif, parmi lesquelles « complicité d’administration d’une plateforme en ligne pour permettre une transaction illicite, en bande organisée », « refus de communiquer, sur demande des autorités habilitées, les informations ou documents nécessaires pour la réalisation et l’exploitation des interceptions autorisées par la loi », « complicité de diffusion en bande organisée d’image de mineur présentant un caractère pédopornographique, de trafic de stupéfiants, d’escroquerie en bande organisée, association de malfaiteurs en vue de la commission de crimes ou délits » et « blanchiment de crimes ou délits en bande organisée ».
Dans un communiqué publié mercredi soir, le parquet de Paris précise par ailleurs qu’« il a été placé sous contrôle judiciaire avec notamment l’obligation de remettre un cautionnement de 5 millions d’euros, l’obligation de pointer au commissariat deux fois par semaine, et l’interdiction de quitter le territoire français ».
Le 8 juillet, une information judiciaire avait été ouverte « contre personne non dénommée », quelques mois après l’ouverture d’une enquête préliminaire d’initiative diligentée par la section de lutte contre la cybercriminalité du parquet de Paris, précise ce dernier. Il est notamment reproché à la messagerie, et donc à son PDG, son absence de coopération avec les autorités judiciaires, notamment dans les affaires de criminalité organisée ou encore de pédopornographie. Le centre de lutte contre les criminalités numériques (C3N) et l’office national anti-fraude (ONAF) ont été saisis par les juges pour poursuivre ces investigations.
« Telegram se conforme aux lois européennes, y compris le règlement sur les services numériques, son action de modération est dans la norme du secteur », a déclaré Telegram dans un communiqué publié dimanche soir, ajoutant qu’il est « absurde de dire qu’une plateforme ou son patron sont responsables des abus » ayant eu lieu sur cette dernière. Contacté, son avocat n’avait pas répondu à nos sollicitations à l’heure de la publication.
Quasi-absence de modération
Avec près de 1 milliard d’utilisateurs dans le monde, dont une large partie dans les anciennes républiques soviétiques, Telegram est devenu, avec WhatsApp, l’une des plus importantes messageries au monde. Un succès lié à son interface simple d’usage, à ses larges groupes de discussion pouvant être ouverts à tous, mais aussi à sa quasi-absence de modération et de coopération avec les autorités judiciaires. S’il est possible d’utiliser cette application comme simple espace de messagerie entre deux utilisateurs, de nombreux groupes – trouvables en quelques minutes à partir de mots-clés – l’utilisent pour des activités illicites, comme vendre de la drogue ou des faux papiers, faire l’apologie du terrorisme ou encore effectuer des escroqueries aux cryptomonnaies.
Il vous reste 43.31% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.