La Serbie a fait les choses en grand et dans sa plus pure tradition diplomatique. C’est dans une capitale couverte de drapeaux français et au son des coups de canon qu’Emmanuel Macron a été reçu, jeudi 29 août, pour signer ce qu’il a appelé « un accord historique » avec ce pays des Balkans resté proche de Moscou pour lui vendre douze avions de combat Rafale.
Le chef de l’Etat, qui s’est extrait pendant vingt-quatre heures des consultations qu’il mène à Paris en vue de désigner un premier ministre, a célébré ce contrat d’exportation, en dépit de son caractère controversé. M. Macron a ainsi estimé que l’achat de Rafale marque un « changement stratégique » et une « vraie démonstration d’esprit européen » d’un pays qui était jusqu’ici uniquement équipé d’avions de combat Mig-29 de technologie russe.
« Pour la première fois, nous allons avoir des avions fabriqués par l’Occident et je pense que c’est une bonne voie à suivre », a également célébré son homologue serbe, Aleksandar Vucic, assurant que « le Rafale est le meilleur avion au monde ». La Serbie s’est engagée à débourser 2,7 milliards d’euros pour neuf monosièges et trois biplaces qui devraient être livrés entre 2028 et 2029, quand ses vieux Mig-29 arriveront en fin de vie.
La Serbie est le huitième pays du monde à opter pour le Rafale après l’Egypte, l’Inde ou les Emirats arabes unis, mais c’est probablement le client le plus sensible en raison de sa proximité historique avec Moscou, associée à sa position géographique en plein cœur de l’Europe et à la persistance de conflits gelés avec plusieurs de ses voisins, à commencer par le Kosovo.
« Changement politique profond »
Emmanuel Macron a voulu positiver en assurant que le « club Rafale » peut « participer à la paix en Europe » et être une « formidable chance d’intégration régionale » comme la Croatie et la Grèce sont déjà équipées du même avion. Selon Eric Trappier, le directeur général de Dassault Aviation qui faisait également partie du voyage, les Serbes devraient obtenir « le modèle le plus moderne actuellement en service dans l’armée française ».
Il a toutefois refusé de préciser s’il s’agit du F3R ou du F4.1, alors que la Croatie voisine a récemment acquis des F3R d’occasion et regarde avec inquiétude ce contrat conclu avec son ennemi historique. Si la Serbie va pouvoir équiper ses Rafale avec des missiles MICA, la France a toutefois pour l’instant refusé de lui donner accès au Meteor, un missile plus récent et qui a une plus grande portée.
Le président français a par ailleurs évacué les craintes d’espionnage ou de transfert technologique vers la Russie. « Toutes les garanties sont toujours prises pour préserver notre propriété intellectuelle et notre savoir-faire », a-t-il défendu. Ni M. Trappier, ni l’Elysée n’étaient toutefois en mesure de détailler les dispositifs techniques qui auraient été pris spécifiquement pour éviter que le client serbe fasse fuiter les technologies vers Moscou.
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