L’interdiction du téléphone portable à l’école et au collège, effective depuis une loi de 2018, est-elle insuffisante ? Près de 200 collèges partout en France s’engagent à aller plus loin en cette rentrée en testant une « pause numérique » totale. Les 50 000 élèves concernés devront déposer leur téléphone à l’entrée de l’établissement et le récupérer en fin de journée.
Pour Nicole Belloubet, ministre démissionnaire de l’éducation nationale, à l’initiative de cette expérimentation, l’ambition est d’augmenter les résultats des élèves, en limitant les effets de distraction, et d’améliorer le climat scolaire. « Beaucoup de phénomènes de harcèlement viennent de l’utilisation du téléphone portable, y compris dans les établissements, bien que théoriquement, cela soit interdit », a-t-elle expliqué, lundi 2 septembre, sur France Inter. La généralisation de cette mesure « devrait intervenir dès janvier 2025 », a affirmé l’ancienne rectrice, lors de sa conférence de presse de rentrée, le 27 août.
Malgré l’interdiction, il n’est pas rare aujourd’hui que les élèves consultent leur téléphone au collège. Cette « utilisation s’organise largement dans les toilettes », a indiqué la commission dite « écrans », chargée d’étudier l’impact de l’exposition des écrans sur les jeunes, dans son rapport remis le 30 avril au président de la République. « Les échanges massifs de contenus sur ce qui se passe aux abords ou dans les collèges ont lieu, précise-t-elle, et les téléphones ne sont pas toujours éteints lors des cours. »
Même si « certaines situations localisées ou ponctuelles de moindre respect ou de tensions peuvent perdurer », ces experts jugent que l’interdiction est aujourd’hui « respectée » et « ne présente pas de difficultés majeures ». Ils préconisent cependant de « renforcer l’effectivité de l’interdiction » en laissant la liberté aux chefs d’établissement de déployer des mesures souples ou plus contraignantes.
L’Etat ne participe pas au financement
Avec la pause numérique, c’est l’option contraignante que Nicole Belloubet veut tester. Chaque établissement volontaire doit choisir comment procéder et modifier son règlement intérieur pour rendre le dispositif opérationnel. Les départements, chargés du bâti et de l’équipement des collèges, peuvent être mis à contribution pour l’achat de matériel : casiers ou pochettes anti-ondes par exemple. L’Etat ne participe pas au financement.
L’expérimentation, et encore plus l’annonce de sa généralisation, suscitent la circonspection des syndicats comme des collectivités territoriales. « La lutte contre le harcèlement en milieu scolaire est un sujet crucial, mais elle passe par bien d’autres éléments que ce gadget », s’agace Sophie Vénétitay, secrétaire générale du SNES-FSU. Bruno Bobkiewicz, secrétaire général du syndicat des chefs d’établissement SNPDEN-UNSA, abonde : « Je ne comprends pas vraiment le sens de cette proposition. Le problème numéro un n’est pas l’usage du téléphone dans le collège, qui est déjà interdit, mais bien à l’extérieur de l’établissement. »
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