Géraldine Farges, chercheuse à l’Institut de recherche sur l’éducation (université de Bourgogne), a dirigé avec Loïc Szerdahelyi l’ouvrage En quête d’enseignants. Regards croisés sur l’attractivité d’un métier (Presses universitaires de Rennes, 220 p., 20 €).
Depuis quand parle-t-on de la crise du recrutement chez les enseignants ?
Si l’on évoque les difficultés dans le recrutement des enseignants depuis au moins les années 1990, la question de l’attractivité du métier se pose de manière plus prégnante à partir des années 2010. Après d’importantes suppressions de postes sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, son successeur François Hollande décide en 2012 d’inverser la tendance. Mais on découvre rapidement qu’il manque de candidats pour pourvoir tous les nouveaux postes créés.
La baisse des candidatures était, en fait, déjà à l’œuvre depuis les années 2000. L’attractivité du métier s’impose dès lors dans le débat public à chaque concours qui ne fait pas le plein. Et le recours aux enseignants contractuels pour pallier les manques est de plus en plus assumé depuis 2015.
Comment expliquer la relative désaffection des étudiants pour les carrières enseignantes et quels leviers pour y remédier ?
L’enseignement est un des métiers dits « de cadre » qui attirent le plus d’étudiants ne venant pas des milieux sociaux les plus privilégiés. La place du concours dans les études est donc importante : plus celui-ci arrive tard, plus le vivier se réduit. Car il faut être capable de financer cinq années d’études quand les concours de l’enseignement sont passés en fin de master 2 comme aujourd’hui. Sans parler du risque coûteux de rater in fine ce concours…
Il s’agit là d’une des raisons qui motivent le retour possible de ces concours à bac + 3 (comme ils l’étaient avant la réforme de la masterisation de 2010). Cette mesure peut être attractive pour les étudiants modestes si elle donne accès au statut de fonctionnaire stagiaire en master (donc rémunérés).
La représentation qu’ont les étudiants du métier est aussi évidemment importante. On parle souvent des conditions salariales qui peuvent les détourner vers des métiers plus attractifs financièrement. C’est vrai. Mais les conditions d’affectation imposées après le concours [le fait d’être potentiellement nommé loin de chez soi] pèsent aussi dans la balance, de même que les conditions de travail. Travailler sur la revalorisation du statut social des enseignants est primordial.
Le renouvellement du vivier de nouveaux enseignants passe aussi par les personnes qui bifurquent après une première expérience professionnelle…
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