La menace couvait depuis quelques jours : l’accord entre Gabriel Attal et Laurent Wauquiez pour se répartir les postes-clés de l’Assemblée nationale a été ouvertement rompu mercredi 9 octobre sur une présidence de commission, marquant une nouvelle fracture entre les nouveaux alliés.
Le bras de fer entre les présidents des groupes Ensemble pour la République (EPR) et Droite républicaine (ex-Les Républicains) a coûté aux macronistes la présidence de la commission des affaires économiques, ravie par Aurélie Trouvé (La France insoumise, LFI). Une passe d’armes qui a échaudé Matignon, à l’heure où se profile l’épreuve du budget. Michel Barnier a fait connaître « sa préoccupation » face à une « solidarité » de ses alliés « qui n’a pas été au rendez-vous », selon son entourage, cité par l’Agence France-Presse.
Gabriel Attal et Laurent Wauquiez avaient pourtant conclu un accord lucratif cet été sécurisant moult postes-clés. Mais le groupe LR a finalement estimé ne pas être assez bien servi, d’autant qu’il n’est pas assuré de récupérer une vice-présidence laissée vacante par Annie Genevard, entrée au gouvernement.
Alors que les macronistes tentaient mercredi de conserver les présidences des commissions des affaires économiques, des affaires étrangères et des affaires sociales après le départ des précédents présidents au gouvernement, la droite a ouvert un front en présentant deux candidats aux affaires économiques et aux affaires étrangères.
Pour cette dernière, la lutte s’est résolue pacifiquement : le LR Michel Herbillon et la RN Alexandra Masson ont retiré leur candidature au troisième tour, le report des voix faisant élire Bruno Fuchs (MoDem). Aux affaires sociales, la droite n’a présenté personne face au nouveau président, Frédéric Valletoux (Horizons). Mais aux affaires économiques, le troisième tour a viré au règlement de comptes : Julien Dive a retiré sa candidature, mais des LR se sont abstenus et l’un d’eux a voté pour Aurélie Trouvé, selon M. Dive. Pour le grand plaisir du RN, qui a pilonné la droite, Laurent Wauquiez en tête : « Les coups de billard à je ne sais combien de bandes font que LR est maintenant le paillasson de [LFI] », a raillé Laure Lavalette, députée RN.
Fusil rechargé et menace de censure
Lors d’une réunion du groupe EPR dans l’après-midi, Gabriel Attal a dénoncé un projet « funeste » de Laurent Wauquiez, et une séquence qui vient « fragiliser la confiance » entre les deux camps, selon des participants. Tout en appelant à ne pas tomber « dans un piège » et à se concentrer sur « l’intérêt du pays ». Côté LR, on dénonce la gourmandise des macronistes. Le camp présidentiel « a cinq présidences de commission, (…) LR zéro », a pointé le député LR Julien Dive. Le groupe de Laurent Wauquiez n’est que le cinquième en nombre d’élus à l’Assemblée, mais dispose de plus de députés que Horizons ou le MoDem, qui ont obtenu une présidence de commission.
Pour Richard Ramos (MoDem), ces turbulences sont liées aux ambitions de M. Wauquiez pour 2027, qui conduiront la droite à « sortir assez vite » du jeu gouvernemental, car « sinon ils seront entachés de macronisme ». Eric Bothorel, classé à l’aile gauche d’EPR, est allé plus loin : « Avec le vote des Républicains (…) je n’ai aucun état d’âme à voter la prochaine motion de censure qui sera déposée », a-t-il assuré sur X dans un message illustré d’un fusil en train d’être chargé.
L’image, qui a choqué dans les rangs de la gauche et du RN, n’a pas été supprimée par l’élu des Côtes-d’Armor. « Imaginez la déflagration politique et médiatique si c’était un “insoumis” qui avait tweeté comme ça… », a souligné le député LFI Raphaël Arnault. Le 24 septembre dernier, le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, avait annoncé saisir la justice d’un tweet de Raphaël Arnault évoquant un « assassinat de Kanak par les forces policières françaises » en Nouvelle-Calédonie.
Tensions également à gauche
L’heureuse élue Aurélie Trouvé s’est elle dite « honorée » de présider une commission couvrant des sujets stratégiques comme l’agriculture, l’énergie ou le logement. Elle a salué un résultat qui « traduit le vote des Français » aux législatives, où le Nouveau Front populaire (NFP) est arrivé en tête.
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Une alliance également traversée de tensions, à l’image de ce qui s’est déroulé lors de l’élection à la présidence de la commission des affaires sociales. Le socialiste Jérôme Guedj, frontalement opposé à la direction de LFI et qui ne voulait pas de l’étiquette « NFP » aux législatives, a été choisi comme candidat, au lieu de son camarade Arthur Delaporte. Mais des bulletins « Arthur Delaporte » ont quand même été déposés dans les urnes, et au dernier tour Jérôme Guedj n’a pas fait le plein à gauche. « Les “insoumis” (et des écologistes) préfèrent voter blanc », a-t-il fustigé sur X.