En quarante ans de métier, Jérôme Genty pensait avoir tout connu. Du gel, des sécheresses, des canicules. Dans son exploitation de 220 hectares à Courbouzon, en Loir-et-Cher, où il fait pousser blé, colza, orge, maïs et quelques légumes, il a « vécu tout ce que l’on peut vivre sur une exploitation céréalière ». Mais 2024 restera comme une année noire. Les difficultés ont commencé il y a un an, avec une pluie excessive qui a perturbé chaque étape de culture, des semis aux récoltes. Dernier épisode : les 8 et 9 octobre, lors du passage de la tempête Kirk, 55 millimètres de cumul de pluie se sont déversés sur un sol déjà gorgé d’eau. « J’ai des champs noyés sur 20 à 30 centimètres », déplore Jérôme Genty.
En un an, il est tombé 1 000 millimètres de cumul de pluie, contre 640 millimètres habituellement en moyenne. « C’est comme si l’on avait eu l’équivalent de six mois de pluie en plus sur l’année », s’alarme l’agriculteur. Difficile dans ces conditions pour les plantes de s’enraciner et de se développer correctement. Compliqué également de passer la moissonneuse aux dates prévues initialement pour les récoltes. Au total, sur ses cultures d’hiver, Jérôme Genty affiche une baisse de production de 30 % à 40 %, conséquence de surfaces où il n’a rien pu semer et de rendements en berne. S’il espère encore pouvoir compter sur ses cultures de maïs, de sorgho et de millet, qu’il devrait récolter sous quelques semaines, tout dépendra des conditions météorologiques. « C’est vraiment une année calamiteuse. On scrute en permanence les prévisions, mais on voit bien que la nature a le dernier mot », soupire-t-il.
Jérôme Genty n’est pas un cas isolé. Les céréaliers français ont enregistré cette année des volumes de production en baisse de 22 % par rapport à la moyenne des cinq dernières années, selon le ministère de l’agriculture. Ils ne sont pas seuls à avoir été affectés par les caprices du climat : la vigne a particulièrement souffert dans le Sud en raison du manque d’eau, et devrait afficher des volumes en baisse de 11 % par rapport à la moyenne. La production d’abricots a, elle, reculé de plus de 30 % par rapport à l’an passé. Si certaines cultures comme les fraises ont bénéficié de conditions climatiques favorables, d’autres sont en difficulté, à l’image du melon, dont les volumes de production se sont repliés de 10 %. La météo a aussi affecté la qualité des récoltes, le secteur craignant de devoir déclasser de grands volumes de blé vers des marchés moins rémunérateurs, comme l’alimentation animale.
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