Rouvrir le dossier politique du futur statut de la Nouvelle-Calédonie tout en évitant le naufrage économique immédiat du territoire : la visite du ministre des outre-mer à Nouméa, du mercredi 16 au samedi 19 octobre, était lourde d’enjeux. La personnalité prudente de François-Noël Buffet, ancien élu local et président expérimenté de la commission des lois du Sénat, qui avait averti des risques portés par la politique calédonienne du précédent gouvernement, permettra-t-elle d’avancer ?
Quand l’insurrection a éclaté, le 13 mai, « des hommes et des femmes ne se sont plus compris, lâchant prise brusquement sur le dialogue et les accords de Matignon [en 1988] et de Nouméa [en 1998] », a constaté M. Buffet, jeudi 17 octobre, au centre culturel Tjibaou. Pour lui, il s’agit désormais que « les gens se parlent », pour « construire un projet solide pour l’avenir ».
Jusqu’à décembre 2024, 650 millions d’euros auront été avancés par l’Etat (hors crise du nickel), et le ministre a promis la « poursuite de l’engagement de l’Etat » pour sauver l’économie calédonienne – avec notamment la prise en charge à 100 % de la remise en état des bâtiments scolaires détruits et à 70 % de celle des autres infrastructures publiques. Le chômage partiel continuera d’être financé jusqu’à fin 2024. En pleine bataille parlementaire sur le projet de loi de finances pour 2025, les annonces en sont toutefois restées là.
Venu « objectiver les besoins pour mieux défendre le dossier à Paris », le ministre a ainsi suscité la vive déception des milieux économiques. « Nous avons attendu deux mois un gouvernement, et la réponse apportée témoigne d’un décalage énorme entre la position de l’Etat et la situation, qui est explosive, alerte Mimsy Daly, présidente du Medef-Nouvelle-Calédonie. Or la responsabilité de l’Etat dans le niveau des destructions sur ce territoire est engagée, car il y a eu une défaillance dans l’exercice de protection des biens et des personnes. »
« Besoin de visibilité »
Après une insurrection indépendantiste galvanisée par les inégalités sociales, voilà les deux dossiers, économique et politique, plus que jamais liés. Car la crise a conforté une idée, au-delà même du camp indépendantiste : la souveraineté du territoire sera élargie, et ses liens avec la France aménagés dans le cadre d’un « partenariat-indépendance » ou d’une « indépendance-association ».
Un temps pour reprendre la discussion politique s’ouvre jusqu’à la fin de 2025, a expliqué le ministre, grâce au report des élections provinciales que le Sénat devrait voter le 23 octobre, et l’Assemblée nationale le 6 novembre. La mission conduite par les présidents des deux assemblées à Nouméa mi-novembre permettra de préciser le contenu et le calendrier du dialogue.
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