Il ne devait s’agir que d’une formalité. Au 1er janvier, après deux ans de travaux de son conseil scientifique, le nouveau mode de calcul du Nutri-Score (l’étiquetage qui renseigne sur la composition nutritionnelle des aliments selon une échelle de notes de A à E) devait entrer en vigueur. Cette nouvelle version de l’algorithme, fruit d’un consensus scientifique et d’un accord entre les Etats qui l’ont adopté, devait notamment aider le consommateur à mieux s’y retrouver, en distinguant davantage les produits en fonction de leurs quantités de sucre, sel, gras et fibres.
Mais au 21 octobre, l’arrêté ministériel actant la mise à jour du Nutri-Score n’a toujours pas été publié. Et les consommateurs, eux, restent perdus entre les informations sur les nouvelles notes ayant circulé dans les médias, et les étiquettes vues en rayon qui continuent d’afficher les anciens scores.
Officiellement, le gouvernement invoque un problème de calendrier, lié notamment à la dissolution de l’Assemblée le 9 juin, puis à la période au cours de laquelle le gouvernement démissionnaire a expédié les affaires courantes. Contrairement aux autres pays qui ont adopté le Nutri-Score (Allemagne, Espagne, Luxembourg, Belgique, Pays-Bas, Suisse) et qui ont appliqué d’emblée le nouvel algorithme, la France était tenue, en raison d’une subtilité administrative, de notifier à la Commission européenne son projet d’arrêté, ouvrant un délai de six mois d’allers-retours. Mais, depuis le 1er juillet, plus rien n’empêche la publication de l’arrêté, qui se trouve prêt sur le bureau du ministre de la santé.
« Cela aurait pu être traité dans les affaires courantes pendant l’été », s’étonne l’épidémiologiste Serge Hercberg, ancien président du Programme national nutrition santé et dont les équipes ont mené les travaux du Nutri-Score. Le nouveau gouvernement, entré en fonctions début septembre, ne s’est pas davantage empressé de publier l’arrêté. De quoi faire craindre que l’actualisation du Nutri-Score ne fasse l’objet de blocages interministériels.
« Un danger mortel » pour le comté
Ce retard est révélateur de la frilosité de l’exécutif sur ce dossier depuis quelques années. Le nouveau gouvernement compte des membres qui ont affiché leur hostilité à ce dispositif. Le ministre de l’économie, Antoine Armand, s’est notamment illustré en prenant la tête, en mars, quand il était député Renaissance de Haute-Savoie, d’un groupe de parlementaires réclamant de « réviser les méthodes de calcul du Nutri-Score », estimant que les fromages en particulier allaient se retrouver injustement déclassés.
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