Une enquête du journal « Le Monde » révèle qu’une application de fitness permettait de suivre à la trace Emmanuel Macron.
Des agents en charge de sa sécurité publiaient sur Strava leurs séances de jogging, compromettant ainsi la sécurité du président de la République, avancent nos confrères.
Des risques « très faibles », assure l’Élysée.
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Bonjour ! La Matinale TF1
Des agents en charge de la sécurité d’Emmanuel Macron utilisent Strava pour analyser leurs séances de jogging. Le problème ? Certains ont laissé fuiter sur Internet le détail de leur parcours, relevé par leur bracelet connecté ou leur smartphone. Des informations qui posent un problème évident de sécurité. Dans une série d’enquêtes intitulée « StravaLeaks (nouvelle fenêtre)« , le quotidien Le Monde montre que l’itinéraire et les lieux de résidence de plusieurs chefs d’États, dont Emmanuel Macron, ont pu être identifiés grâce aux parcours publiés par des membres de leur équipe de sécurité sur cette application.
Très prisée des adeptes de course à pied et de vélo, cette application de fitness intègre un système de géolocalisation qui permet de visualiser en direct, sur une carte, les déplacements des autres utilisateurs à travers le monde. S’il peut être rassurant pour un joggeur ou une cycliste de laisser des proches connaître sa route, il en va un peu différemment pour les déplacements d’un chef de l’État. « Cette application, comme beaucoup d’autres applications sportives, va en fait suivre les activités que vous réalisez. Et quand je dis suivre, cela va jusqu’au suivi très précis votre localisation », explique Gérôme Billois, expert en cybersécurité, auprès de TF1.
Elle représente un risque pour les gens qui veulent vraiment garder leur identité et leurs déplacements secrets
Elle représente un risque pour les gens qui veulent vraiment garder leur identité et leurs déplacements secrets
Gérôme Billois, expert en cybersécurité
Selon ce spécialiste, cette application « représente un risque pour les gens qui veulent vraiment garder leur identité et leurs déplacements secrets ou qui doivent le faire, peut-être pas directement pour eux, mais pour les gens dont ils ont la responsabilité ». Contactée par Le Monde, l’entreprise Strava Labs s’est défendue de toute responsabilité dans cette affaire. « Bien que notre plateforme soit conçue pour tout le monde, nous attendons des personnes exerçant des professions sensibles qu’elles se saisissent des contrôles disponibles et limitent leur contenu de manière appropriée », déclare l’entreprise dans un communiqué.
Des agents en charge de la protection d’Emmanuel Macron ont été géolocalisés à plusieurs reprises dans une zone où se trouvait le président de la République. De son côté, l’Élysée a relativisé le risque. « Les conséquences des faits mentionnés […] sont très faibles et n’ont en aucun cas des impacts sur la sécurité du président de la République« , a ainsi assumé la présidence dans un communiqué de presse.
Selon Bruno Pommard, ancien instructeur opérationnel au Raid sollicité par TF1, « il n’y a pas [eu] de faille de sécurité » concernant la préparation du voyage du président de la République évoqué dans cette enquête. « On sait qu’une dizaine d’hôtels ont été identifiés. Mais vous avez, lorsqu’un président de la République se déplace dans un pays quel qu’il soit, les médias sont souvent les premiers à savoir où se trouvent le logement et l’accueil des personnalités », juge l’ex-superflic dans un entretien vidéo diffusé ce mardi matin dans l’émission « Bonjour ! La matinale TF1 ».
Soldats en opération, agents des services secrets…
En 2022, une enquête du journaliste d’investigation Jean-Marc Manach publié sur le média Loopsider avait montré que des membres des services secrets français utilisaient l’application sportive Strava et qu’il était possible de les géolocaliser. Parmi eux figurait, à l’époque, le numéro deux (nouvelle fenêtre) de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE).
En outre, en 2018, après la publication d’une carte dévoilant l’emplacement de bases américaines plus ou moins secrètes à l’étranger, ainsi que les déplacements de militaires en opérations dans des zones de guerre, le Pentagone avait pris des mesures pour en encadrer l’usage.
Un an plus tôt, les déplacements de soldats français déployés à Gao, au Mali, avaient également été repérés sur la carte de l’application Strava, compromettant ainsi leur sécurité. L’état-major des armées avait alors dû rappeler en interne les consignes de sécurité élémentaires sur l’utilisation des objets connectés : « Les armées françaises ont pleinement conscience que les nouvelles technologies […] peuvent mettre en péril la sécurité des opérations ; c’est pourquoi des consignes sont régulièrement passées à nos militaires. Il est en particulier rappelé de désactiver les fonctions de géolocalisation et de GPS. »