Stéphane Lupano a été chef d’entreprise dans l’imprimerie et électeur de droite. La mort de Jean-Marie Le Pen, en janvier, a fini de lui ôter toute culpabilité : dimanche 14 septembre, il grignote une barquette de frites devant l’entrée de son premier meeting du Rassemblement national (RN). Dans le Médoc où il vit, le vote à l’extrême droite a cessé d’être un secret honteux : on « est RN », on le dit, et on enjoint aux voisins de ne plus avoir « la main qui tremble dans l’isoloir ».
Son entreprise s’est plantée, il n’a pas voulu du chômage trop longtemps : le voilà à l’usine, « aux 3 × 8 », navré de cette jeunesse qui part dix jours après l’embauche, « parce que c’est dur », et ne vient plus ramasser le raisin, à tel point que le château d’en face doit faire venir des cars de Roumains. « Mais ça va, ils repartent après. »
Il phosphore sur les solutions pour remettre le budget de la France en ordre, puis s’interrompt, et montre du doigt l’esplanade du palais 2 l’Atlantique de Bordeaux : « De toute façon, regardez la couleur des gens qui viennent ici. Il faut se le dire, on est tous là pour une chose : l’immigration, ça suffit. » Des Français blancs de tout âge, « de souche » comme ils se décrivent eux-mêmes, qui viennent applaudir les promesses martiales de la présidente du groupe des députés RN, Marine Le Pen, et du président du parti, Jordan Bardella, contre les étrangers. Nombreux, près de 6 000, dans ce qui fut jusqu’aux années 2010 une terre de mission. Zone de conquête aujourd’hui : ces dernières années, les élus ont poussé comme les champignons après la pluie dans les zones déshéritées de Nouvelle-Aquitaine.
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