Devant le service de chirurgie dentaire de l’hôpital de Brest (Finistère), une heure avant l’ouverture, la queue est parfois si longue qu’on demande aux patients de revenir l’après-midi. Avec 32 000 consultations par an, le service est complètement saturé.
« Plus aucun créneau n’est disponible depuis un an, ce qui fait qu’on ne peut pas assurer de suivi pour des patients venus aux urgences », décrit Sylvie Boisramé, professeure des universités et praticien hospitalier, à la tête de la faculté d’odontologie de l’université de Bretagne occidentale.
La pénurie de dentistes est telle, dans le Finistère, que les habitants ne savent plus où se soigner et se retrouvent à faire la queue au centre hospitalier universitaire. La fréquentation des urgences dentaires est passée de 5 000 à 13 000 patients annuels entre 2020 et 2024. « Les gens appellent une quarantaine de cabinets qui répondent qu’ils ne prennent plus de nouveaux patients », relate Mme Boisramé. Elle cite le cas de deux jeunes diplômés de la faculté qui viennent d’ouvrir un cabinet à Châteaulin, commune de 5 000 habitants située au centre du département, et qui ont vu « leur standard téléphonique exploser en un après-midi ».
« On va être à l’étroit »
Le Finistère compte un chirurgien-dentiste pour 1 437 habitants et les départements voisins sont encore moins bien lotis, avec un ratio de 1 pour 1 708 patients dans les Côtes-d’Armor et de 1 pour 1 480 patients dans le Morbihan. Selon les estimations de la Caisse nationale d’assurance-maladie, un chirurgien-dentiste n’a la capacité de soigner dans de bonnes conditions qu’un maximum de 831 patients par an.
Pour répondre à cet enjeu de santé publique, Sylvie Boisramé a décidé d’augmenter de 40 % les effectifs étudiants à la rentrée de 2025, qui passeront de 36 à 50. Elle fait le pari qu’à l’issue de leur cursus, en 2031, les nouveaux diplômés exerceront dans le département – ou dans la région Bretagne, laquelle compte 20 000 habitants supplémentaires chaque année, selon l’Insee.
Cette montée en charge a un coût : 800 000 euros pour rénover la salle des prothèses, remplacer les simulateurs vieux de vingt ans et acheter les tablettes nécessaires au passage des examens du troisième cycle. « On va être à l’étroit mais c’est transitoire car nous aurons ensuite un autre bâtiment dédié », explique la doyenne, qui a reçu le soutien de l’université, du conseil départemental, de Brest Métropole, de l’agence régionale de santé de Bretagne et a lancé un appel au financement participatif ouvert aux particuliers et aux entreprises. Elle attend par ailleurs de l’Etat qu’il finance sa part « au prorata du nombre d’étudiants », et qu’il lui accorde deux postes d’enseignants-chercheurs supplémentaires.
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