Rue Robert-Estienne, une impasse du quartier des Champs-Elysées, vit Pierre Edelman. Ou plutôt vivait. Depuis le printemps 2023, le producteur est introuvable. Volatilisé. Injoignable. En mars, le journaliste et essayiste Guillaume Durand s’est résolu à se rendre, avec un autre ami de longue date, au commissariat du 8e arrondissement de Paris pour signaler sa disparition.
Dans l’une de ses nombreuses vies, l’homme fut une figure discrète mais essentielle de la planète cinéma. Notamment comme apporteur de talents chez Ciby 2000, la défunte société de production fondée en 1990 par le géant du BTP Francis Bouygues, puis chez StudioCanal jusqu’au mitan des années 2000. L’écurie de Pierre Edelman parle pour lui : David Lynch au long des années 1990 et 2000, de Lost Highway (1997) à Mulholland Drive (2001) ; Pedro Almodóvar à la même période avec Talons Aiguilles (1991), La Fleur de mon secret (1995), Tout sur ma mère (1999) ; Emir Kusturica, en particulier au moment de sa Palme d’or au Festival de Cannes, en 1995, pour Underground. Dire que ces réalisateurs, alors au sommet de leur art, doivent tout à Pierre Edelman serait exagéré. Mais sans ce dernier, c’est une évidence, leur carrière n’aurait pas été la même.
Pierre Edelman était un matchmaker. Un entremetteur de très haut niveau, dans un écosystème du cinéma où le facteur humain est essentiel. Il était un intime de Dennis Hopper, Francis Ford Coppola ou Oliver Stone, passait ses vacances à Saint-Tropez (Var) avec Clint Eastwood, rendait visite à Marlon Brando à Tahiti, vivait chez Jack Nicholson dans sa villa de Los Angeles sur Mulholland Drive.
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