Réunis une dernière fois avant les vacances d’été à Bruxelles, les 27 ministres se sont positionnés, le 16 juillet, sur les suites à donner au rapport préparé par la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, sur le non-respect par l’Etat hébreu de l’accord d’association avec l’Union européenne (UE) ; il avait été dévoilé à la mi-juin. Selon ce document, « il existe des indications selon lesquelles Israël n’aurait pas respecté ses obligations en matière de droits de l’homme », principe mentionné dans l’article 2 de l’accord.
Les Etats de l’UE ont refusé, pour l’instant, d’endosser une ou plusieurs des dix mesures de rétorsion présentées pendant la réunion de mardi par la haute représentante. Ces sanctions allaient d’une suspension de l’accord d’association à des mesures plus ciblées, comme un embargo contre les produits issus des colonies juives de Cisjordanie ou la suspension de la participation d’Israël à certains programmes européens, comme Erasmus pour les étudiants et Horizon pour les chercheurs.
Si quelques pays exigeaient des sanctions, la moitié des Etats membres ne voulaient toujours pas en entendre parler, à commencer par l’Allemagne, la République tchèque et l’Italie.
A ce sujet, je vous renvoie au compte rendu du tchat que nous avons organisé ce matin avec Jérôme Bourdon, historien des médias.
Il rappelle que les Israéliens n’ont pas eu jusqu’à ces derniers jours accès aux images d’horreur, elles-mêmes d’ailleurs relativement peu nombreuses par rapport à l’ampleur de la famine et des destructions. Il faut bien sûr faire exception pour ceux ou celles qui les cherchaient activement sur les réseaux sociaux, sur les fils d’Al-Jazira, ce qui concerne particulièrement les citoyens palestiniens d’Israël (qu’on appelle en Israël « Arabes israéliens »).
Dans l’espace public, ces images ont filtré depuis un mois ou plus lorsque des manifestants (en tout petit nombre) ont brandi des photos d’enfants gazaouis morts, sans signe de malnutrition, mais comme simple rappel qu’Israël était responsable de la mort d’enfants. Ces images (agrandies) ont été les plus présentes dans le centre de Tel-Aviv, lors d’une manifestation contre la guerre qui a rassemblé, disons, un millier de personnes (mais la manifestation n’a pas été très couverte). La prise de conscience existe, donc, mais reste modeste.
Pour avoir un autre éclairage à ce sujet, je vous renvoie à un entretien au Monde, le 16 juillet, de la chercheuse Dahlia Scheindlin, installée à Tel-Aviv. Elle détaillait l’absence de consensus sur la façon de régler le conflit israélo-palestinien et rappelait que dans un récent sondage 82 % des Israéliens juifs étaient favorables à l’expulsion des Gazaouis.
« En 2016, l’idée d’expulser la population non juive était déjà répandue, comme l’avait alors montré un sondage réalisé par le think tank américain Pew Research Center : 48 % des Israéliens juifs interrogés étaient favorables à l’expulsion des Arabes de l’Etat d’Israël. Huit ans plus tard, en 2024, 87 % des Israéliens juifs estimaient que l’armée israélienne employait une force insuffisante ou d’un niveau convenable », expliquait la chercheuse.
« Un autre sondage, réalisé en mai de cette année, affirmait que près de 80 % des Israéliens juifs jugeaient que leur pays n’a pas ou peu à prendre en considération la souffrance de la population civile gazaouie dans la poursuite de la guerre », précisait la spécialiste.
Paul