Le directeur de l’Opéra de Rouen Normandie, Loïc Lachenal, n’avait pas prévu que le calendrier lyrique de sa saison épouserait les voies romaines, qui viennent, après les avoir béatifiées en 1906, de canoniser et d’inscrire au martyrologe, en décembre 2024, les seize carmélites de Compiègne condamnées à mort par le Tribunal révolutionnaire et guillotinées à Paris le 17 juillet 1794. Considéré à juste titre comme l’un des opéras les plus hautement dramatiques du répertoire français, Dialogues des carmélites (1957), de Francis Poulenc (tiré de la pièce éponyme de Georges Bernanos), trouve ici en Tiphaine Raffier, qui réalise sa première mise en scène d’opéra, une interlocutrice visionnaire.
Loin de tout sentimentalisme ou d’exaltation sulpicienne, la direction d’acteurs se concentre sur les éléments les plus tangibles de la chair et de sa finitude. Sommes-nous vraiment égaux devant la mort ? Les plus forts meurent-ils plus sagement que les apeurés ? « C’est l’histoire d’une jeune fille qui va apprendre à mourir », résume Tiphaine Raffier à propos de Blanche, fille du Marquis de la Force, entrée au couvent pour se protéger d’un monde dans lequel elle ne peut vivre, avant que celui-ci ne lui offre le destin sacrificiel auquel elle ne pouvait s’empêcher de rêver, comme en témoignent, sur les murs de sa chambre, les iconographies de saints, d’anges exterminateurs ou de guerrières héroïques à la Jeanne d’Arc.
Il vous reste 72.87% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.