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« C’est pourtant un bel établissement », commente, presque désolé, un agent pénitentiaire. Avec ses formes épurées de grand parallélépipède blanc, son implantation devant le lagon et la mangrove, et le terrain de football voisin sur lequel broutent des zébus, le centre pénitentiaire de Majicavo donne une impression de modernité incrustée dans un décor typiquement mahorais. Ouvert en juin 2014, construit sur les décombres de l’ancienne prison, l’établissement était alors le symbole d’un ambitieux changement d’époque. Jusque-là, Majicavo abritait des « cages à poules », selon une expression locale. De grandes chambrées où s’entassaient entre vingt-cinq et trente détenus. Une spécificité tropicale d’un autre siècle.
Dix ans plus tard, ce grand bond en avant paraît n’avoir jamais existé. Comme beaucoup d’infrastructures publiques à Mayotte, l’établissement a mal vieilli et souffre d’infinis problèmes de maintenance. Quelques mois ont suffi pour que, malgré la création de nouvelles places, la prison soit en situation de surpopulation.
D’une capacité de 278 places, l’établissement accueillait, jeudi 23 mai, 645 détenus. Dans la partie réservée au centre de détention (les détenus condamnés à une peine supérieure à deux ans), le taux de surpopulation carcérale est unique en France : 298,2 % au 1er mai, soit 340 prisonniers pour 114 places. « Le record à Majicavo a été atteint le 1er janvier, avec un total de 678 détenus », reconnaît Nicolas Jauniaux, chef de l’établissement, où Le Monde a pu se rendre dans le cadre du droit de visite exercé par la sénatrice de Saint-Barthélemy, Micheline Jacques (Les Républicains, LR), qui s’est déplacée à Mayotte à la tête d’une mission parlementaire sur les adaptations des missions de l’Etat et des lois dans les outre-mer.
Dans cette prison totalement encombrée, le droit à l’encellulement individuel reste purement théorique. Il concerne seulement ceux souffrant de graves problèmes psychiatriques. Quatre, voire cinq détenus s’entassent dans des cellules de 13,4 mètres carrés ; les plus chanceux dans celles de 19 mètres carrés, réservées aux personnes à mobilité réduite.
Ce 23 mai, 257 détenus de Majicavo étaient obligés de dormir sur des matelas installés par terre. Soit presque la capacité théorique de l’établissement. Une fois enroulés, les matelas servent aussi de siège. « Pour le dire poliment, les capacités d’hébergement sont insatisfaisantes », répond le directeur de Majicavo au sénateur de la Manche Philippe Bas (LR), présent lors de la visite, qui, lui, parle de « taux de sous-capacité carcérale ».
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