Un exemplaire du Code civil ayant appartenu à Napoléon sera mis aux enchères le 6 mars prochain.
Estimé entre 100.000 et 200.000 euros, il était jusqu’ici entre les mains des descendants d’un fidèle de l’empereur.
Révolution juridique, le Code civil a écrit pour la première fois les relations entre l’État et les citoyens.
C’est une pièce de collection pas tout à fait comme les autres. L’exemplaire personnel du Code civil de Napoléon sera mis aux enchères le 6 mars prochain, annonce la maison Tajan qui en estime la valeur entre 100.000 et 200.000 euros. « Cet exemplaire sur grand papier vélin au chiffre du Premier Consul est le seul en mains privées. Il est depuis la chute de l’Empire resté au sein d’une même famille« , précise-t-elle dans un communiqué.
Cette famille, c’est celle d’un fidèle de Napoléon, Étienne Charvet, régisseur du château de Saint-Cloud où Napoléon laissa cet exemplaire quand il dut partir en exil pour l’île d’Elbe en 1814. Une lettre autographe de son fils Jean-Pierre Charvet, vendue avec le volume, atteste de l’authenticité de ce document d’une portée historique.
Ma vraie gloire n’est pas d’avoir gagné quarante batailles. Ce que rien n’effacera, ce qui vivra éternellement, c’est mon Code civil !
Ma vraie gloire n’est pas d’avoir gagné quarante batailles. Ce que rien n’effacera, ce qui vivra éternellement, c’est mon Code civil !
Napoléon
Quand il prend le pouvoir en 1799, Napoléon Bonaparte fait de l’élaboration d’un code civil unique l’une de ses priorités. Il nomme en 1800 quatre juristes – Portalis, Maleville, Tronchet et Bigot de Préameneu – pour s’atteler à la tâche. L’ensemble des lois qu’il contient, uniformisant les règles de vie au début du XIXe siècle, seront promulguées en mars 1804.
« Ma vraie gloire n’est pas d’avoir gagné quarante batailles. Waterloo effacera le souvenir de tant de victoires. Ce que rien n’effacera, ce qui vivra éternellement, c’est mon code civil !« , confiera en 1815 l’empereur déchu au fidèle marquis de Montholon sur l’île de Sainte-Hélène.
Près de la moitié des articles d’origine ont été conservés
Le Code civil a constitué une révolution juridique en organisant, pour la première fois, les relations entre l’État et les citoyens, des citoyens entre eux et en soulignant « la non-confessionnalité de l’État« , premier pas vers la laïcité. Avec le code de 1804, « l’état civil échappait définitivement à l’Église et le mariage relevait de la seule loi civile », résumera l’ancien ministre de la Justice Robert Badinter.
Reste que ses articles sur les femmes, aujourd’hui abrogés, apparaissent d’une misogynie inouïe. Au nom de la famille et de sa stabilité, le Code civil a en effet consacré l’infériorité de la femme mariée face à l’homme. L’épouse côtoie les mineurs et les fous au rang d' »incapable », se voit privée de tous ses droits civils du jour de son mariage.
L’article 213 original du « code Napoléon » définit ainsi les relations entre époux : « Le mari doit protection à sa femme, la femme obéissance à son mari« . Il faudra attendre 1970 pour que cet article soit modifié pour désormais prévoir que « les époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille, pourvoient à l’éducation des enfants et préparent leur avenir ».
Le Code civil a résisté au temps puisque près de la moitié des 2281 articles d’origine ont été conservés. La reconnaissance du divorce par consentement mutuel en 1975, la suppression de la distinction entre enfants naturels et légitimes en 2005, la légalisation du mariage pour tous en 2013, ont fait évoluer le vieux code Napoléon. En 2014, c’est l’expression désuète « en bon père de famille » qui a disparu du code, remplacée par l’adverbe « raisonnablement ».