Quatorze personnes ont été tuées dans des affrontements à caractère confessionnel dans la banlieue de Jaramana, a annoncé une ONG mardi 29 avril. Les autorités promettent de poursuivre les personnes impliquées dans ces accrochages. Jaramana est une banlieue à majorité druze, qui compte également des familles chrétiennes.
Des représentants du gouvernement syrien et des Druzes de Jaramana ont conclu après coup un accord, visant à mettre fin aux heurts et à traduire en justice les personnes ayant lancé l’assaut contre ce quartier de la banlieue de Damas. Le texte, consulté par l’Agence France-Presse (AFP), prévoit notamment que « les responsables de l’attaque soient poursuivis et traduits devant la justice ».
Ces violences réveillent le spectre des affrontements confessionnels, un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, dont était issu le président déchu Bachar Al-Assad, renversé en décembre par la coalition islamiste au pouvoir.
Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), « les forces de sécurité ont lancé un assaut » contre Jaramana, dans le sud-est de l’agglomération de Damas, après la publication sur les réseaux sociaux d’un message vocal attribué à un Druze et jugé blasphématoire envers l’islam.
L’OSDH a précisé que le bilan des affrontements dans la nuit de lundi à mardi « avait grimpé à quatorze morts : sept combattants druzes originaires de la ville, ainsi que sept membres des forces de sécurité et des groupes affiliés ».
L’AFP n’a pas pu vérifier l’authenticité du message, mais un journaliste a assisté aux funérailles de deux membres des forces de sécurité tués.
Les autorités religieuses druzes locales condamnent « toute atteinte au prophète Mahomet »
La coalition islamiste au pouvoir depuis décembre, par la voix de son ministère de l’intérieur, a affirmé que les affrontements avaient opposé « des groupes armés » avant l’intervention des forces de sécurité, qui, selon le ministère, se sont déployées « pour protéger les habitants ». Le ministère s’est aussi engagé à « poursuivre » les hommes armés impliqués dans ces affrontements, confirmant sans donner de chiffre qu’il y avait « des morts et des blessés ».
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Un correspondant de l’AFP a vu des combattants locaux fortement déployés à tous les accès menant à Jaramana. Pour leur part, des forces dépendant des ministères de la défense et de l’intérieur étaient envoyées sur la route de l’aéroport international de Damas, tout proche, avec des blindés et des mitrailleuses.
Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont « vivement dénoncé l’attaque armée injustifiée contre Jaramana (…) », tout en condamnant « toute atteinte au prophète Mahomet ».
Enquête ouverte
Le ministère de l’intérieur a aussi annoncé qu’une enquête était ouverte pour identifier l’auteur du message et le traduire en justice.
Le ministère de la justice, lui, a déclaré qu’il « ne tolérerait aucune attaque contre le prophète » Mahomet, mais souligné que le recours à la justice était « le seul moyen légitime » et a appelé les habitants à « s’abstenir de tout discours haineux », sous peine de sanctions.
Les plus hauts dignitaires druzes ont appelé au calme, l’un d’eux, l’influent cheikh Hikmat Al-Hajri, dénonçant « les attaques terroristes » contre les « innocents ». Il a dans le même temps accablé les nouvelles autorités, les accusant de vouloir « marginaliser » les Druzes, à l’instar du pouvoir précédent.
Les Druzes, une minorité ésotérique issue de l’islam, sont répartis entre le Liban, la Syrie et Israël. Dès la chute du pouvoir de Bachar Al-Assad, le 8 décembre, après plus de treize ans de guerre civile en Syrie, Israël a multiplié les gestes d’ouverture envers cette communauté.
Début mars, à la suite d’escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d’une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s’en prenaient aux Druzes.
Les dignitaires druzes avaient immédiatement rejeté ces propos, réaffirmant leur attachement à l’unité de la Syrie. Leurs représentants négocient actuellement avec le nouveau pouvoir central à Damas un accord qui permettrait l’intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.