Brie, emmental et autres produits laitiers français craignent d’être les prochaines victimes des droits de douane supplémentaires annoncés par le président américain.
Les produits laitiers sont la deuxième catégorie de produits agroalimentaires exportée vers les États-Unis.
Les fromages en représentent deux tiers.
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Le second mandat de Donald Trump
Une vigilance… et des inquiétudes. Brie, emmental (nouvelle fenêtre)et autres produits laitiers français craignent d’être les prochaines victimes agroalimentaires des droits de douane supplémentaires annoncés par Donald Trump, après les menaces du président américain sur les vins et les champagnes (nouvelle fenêtre).
En 2024, la France a exporté pour 342 millions d’euros de produits laitiers vers les États-Unis, selon les chiffres des douanes. Les fromages en représentent deux tiers, soit environ 25.000 tonnes par an. Il s’agit surtout du brie (pour 48 millions d’euros), de l’emmental et des produits « à haute valeur ajoutée comme les AOP hors lait cru », puisque ce dernier est quasiment banni d’importation dans le pays, explique à l’AFP François-Xavier Huard, PDG de la Fédération nationale de l’industrie laitière (Fnil).
Le total, en valeur, représente à peine un dixième des 3,8 milliards d’exportations de vins et spiritueux français, menacés jeudi 13 mars par le président américain de voir leurs droits de douane américains monter à 200%. Mais les produits laitiers n’en restent pas moins la deuxième catégorie de produits agroalimentaires exportée vers les États-Unis.
Un marché en pleine croissance
« C’est un marché stratégique, en croissance puisqu’il a doublé en dix ans », explique à l’AFP François-Xavier Huard. Actuellement, les fromages et autres produits laitiers sont taxés à hauteur de 10% pour entrer aux États-Unis. « On aimerait parfois être moins symboliques de l’art de vivre à la française. On se retrouve assez vite dans les méandres des guerres commerciales » qui se jouent surtout sur l’acier ou les voitures électriques, regrette-t-il.
Au cours du premier mandat de Donald Trump, les exportations de produits laitiers avaient subi un « coup d’arrêt, surtout en 2019, avec des pertes d’environ 14 millions d’euros sur les fromages » cette année-là, quand des droits de douane de 25% leur avaient été imposés par l’administration américaine. « On s’attend à peu près à 25%, en plus des 10% existants », indique François-Xavier Huard, Donald Trump ayant annoncé début mars qu’il comptait imposer des droits de douane sur les produits agricoles entrant aux États-Unis à compter du 2 avril prochain. Le secteur des produits laitiers pointe un manque de visibilité à ce stade, alors que les annonces se limitent pour le moment à « deux posts sur le réseau social du président ».
Les produits laitiers ne seront pas tous logés à la même enseigne. « Quand il achète du Brie ou de la Mimolette d’Isigny, le consommateur américain, un peu comme celui qui achète son vin et son champagne, sera en capacité de payer quelques dollars de plus », estime François-Xavier Huard. En revanche, pour des produits moins haut de gamme, quand il existe des marchés de substitution, comme le beurre (30 millions d’euros exportés), avec par exemple le beurre néozélandais, la situation sera plus compliquée, relève le PDG de la Fnil.
Les géants du secteur, comme Savencia, Bel ou Lactalis, qui disposent de sites de production aux États-Unis, pourront compenser avec la production locale mais celle-ci ne pourra pas remplacer les produits liés à des territoires (AOP) et les plus petits producteurs risquent de trinquer. En outre, une réciprocité des droits de douane sur les fromages américains n’aurait quasiment aucun impact vu les très faibles volumes exportés par les États-Unis vers l’Europe.
Italie, Pays-Bas… Ces autres pays inquiets
François-Xavier Huard évoque la possibilité de « baisser les prix de certains produits pour garder un pied dans le marché » américain ou de reporter une partie de la production vers d’autres zones géographiques. « La difficulté, c’est qu’on a d’autres marchés qui se tendent ou qui sont en train de se fermer : la Chine qui représente 600 millions d’euros par an, l’Algérie pour quasiment 150-200 millions. Les trois ajoutés représentent environ un milliard d’euros en valeur, sur les neuf milliards exportés par an », souligne le PDG de la Fnil.
Une réunion de l’European Dairy Association, qui représente les transformateurs de lait européens, doit avoir lieu en mars à Bruxelles, avec des représentants de la Commission européenne. Car l’inquiétude n’est pas que française : l’Italie devance la France en matière d’exportations fromagères vers les États-Unis et les Pays-Bas, ainsi que l’Espagne, sont aussi concernés.