Il réajuste le col de sa chemise, lance un énergique « c’est bon, tout est prêt ? » et ponctue sa question d’une tape décidée sur ses notes. Face aux caméras, à l’occasion, en novembre, du bilan mensuel du gouvernement diffusé sur YouTube, Manuel Adorni, porte-parole du président Javier Milei, reprend les codes des vidéos filmées par les influenceurs : la proximité et la décontraction. Il garde donc au montage cette scène informelle et déguste un maté pendant son intervention, une infusion traditionnelle prisée des Argentins.
Dérégulation de l’économie, « bataille culturelle » contre les politiques progressistes : depuis l’arrivée au pouvoir du président argentin ultralibéral, le 10 décembre 2023, cet économiste de 44 ans est la voix du gouvernement. En un an, sa communication habile et sa popularité parmi les libertariens en ont fait une figure centrale, dans les médias comme dans l’entourage présidentiel.
Manuel Adorni met en scène, au début du mandat de Javier Milei, cet exercice rare dans le pays : une conférence de presse quotidienne depuis le palais présidentiel. Le rituel rappelle le briefing de la Maison Blanche, aux Etats-Unis – pays admiré par le nouveau président –, jusque dans les couleurs choisies pour le décor. La Casa Rosada argentine, fines lignes blanches sur fond bleu foncé, ressemble à la résidence du président des Etats-Unis. « Le chemin est clair : changer l’Argentine, en finir avec l’Argentine de la décadence », annonce Manuel Adorni dès ses premières prestations.
Les conférences – dont la fréquence a depuis été réduite, entre une et trois fois par semaine – s’installent très vite comme un rendez-vous attendu. Après leur diffusion en direct, elles sont reprises en ligne par toute la sphère libertarienne qui en extrait les moments les plus mordants. Le 27 novembre, à peine sorti de la salle de conférences, un collaborateur de Manuel Adorni est hilare devant son portable. Quelques secondes du point de presse du jour ont déjà essaimé sur les réseaux. « Insignifiant », a-t-il répondu à une journaliste qui l’interrogeait sur la violence verbale du président, dénoncée dans une lettre ouverte publiée sur X par Horacio Rodriguez Larreta (centre droit), ancien chef du gouvernement de la ville de Buenos Aires. D’ailleurs, a-t-il fait valoir, la publication de l’élu n’a bénéficié que d’« une poignée de likes, ce qui implique que ses abonnés n’écoutent pas ses propos, que ceux-ci manquent de toute évidence de profondeur, ou que ses abonnés l’ont oublié ».
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