SÉLECTION OFFICIELLE – EN COMPÉTITION
Voici à peu près trente ans que nous recevons, poste restante sur la toile, les messages excentriques, parfumés à la détresse, du jeune Wes Anderson, 56 ans ce premier de mai. Dandy américain réfugié de longue date en France et en Angleterre, quelque chose dans l’œuvre de ce maître de l’aventure loufoque et du design vintage laisse penser qu’il aura réchappé in extremis à on ne sait quel ineffable roman familial.
La famille, en effet, naturelle ou recomposée, biologique ou amicale, est le sujet andersonien électif. Dysfonctionnelle par essence, en triangulation œdipienne souvent, farfelue dans ses développements, in fine suprêmement attachante. Le chaos mental et l’absurdité des situations qui en résultent sont jugulés par un ordonnancement rigoureux de la forme qui les contient. De là à imaginer un Wes Anderson précisément devenu cinéaste pour cadrer la secrète folie qui le taraude, voilà une hypothèse freudienne de base sur laquelle personne n’est tenu de miser un kopeck.
En tout état de cause, Anderson encadre, range, classe, symétrise, maquette, automatise, énumère, colorise, met au cordeau et fixe d’équerre un monde qui branle un peu trop à son goût. Cadres, boîtes, cartes, listes, boussoles, manuels, écriteaux, schémas, modes d’emploi, typographies anciennes, décors, chapitrages, tout est bon à l’ordonnancement rigoureux des choses. Qu’il ne reste qu’à bien nommer, Anderson touchant en la matière au génie : La Famille Tenenbaum (2001), La Vie aquatique (2004), A bord du Darjeeling Limited (2007), Moonrise kingdom (2012), The French Dispatch (2021). Qui ne courrait y voir de plus près ?
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