Le premier ministre portugais de droite modérée, Luis Montenegro, a remporté les élections législatives anticipées, dimanche 18 mai, mais, comme il y a un an, il n’obtient pas une majorité suffisante pour assurer la stabilité politique du pays ibérique.
L’extrême droite représentée par le parti Chega (« Assez »), qui continue de progresser par rapport au dernier scrutin, atteint pour la première fois la barre de 20 % des voix et talonne l’opposition socialiste.
Selon un sondage sortie des urnes diffusé par la télévision publique RTP, le camp du gouvernement sortant aurait obtenu entre 29 % et 34 % des suffrages, contre 21 % à 26 % pour le parti socialiste et 20 % à 24 % pour Chega.
M. Montenegro, un avocat de 52 ans qui a toujours refusé de gouverner avec le soutien de Chega, espérait pouvoir former une majorité plus large en négociant le ralliement de la formation Initiative libérale, qui serait arrivée en quatrième position avec 4 % à 7 % des voix.
Les résultats officiels partiels seront connus plus tard dans la soirée.
En termes de sièges, la coalition sortante aurait remporté 85 à 96 sièges sur un total de 230, ce qui reste en dessous du seuil de 116 élus, synonyme de majorité absolue.
Même en comptant six à douze mandats pour les libéraux, M. Montenegro risque de se retrouver à nouveau pris en tenaille entre le parti socialiste de Pedro Nuno Santos, un économiste de 48 ans, et l’extrême droite emmenée par André Ventura, un ancien séminariste et juriste de 42 ans, qui s’est fait connaître comme truculent commentateur de football.
Le parti socialiste, grand perdant
Contraint de démissionner en mars dernier sur fond de soupçons de conflit d’intérêts, le chef du gouvernement semble ainsi remporter le pari de s’en remettre au verdict des urnes pour assurer sa survie politique, mais ses gains semblent insuffisants pour modifier le rapport de force à l’Assemblée.
Il a peut-être pâti du fait d’avoir lui-même provoqué ces élections pour éviter de s’expliquer devant une commission d’enquête parlementaire au sujet des activités d’une société de conseil enregistrée à son domicile et au nom de ses enfants. « Personne n’a jamais été aussi transparent que moi », a-t-il assuré lors de son dernier meeting de campagne, pendant que le chef de l’opposition socialiste l’accusait d’avoir « mêlé politique et affaires » en touchant de l’argent d’entreprises privées après son entrée en fonctions.
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Le PS, battu de justesse en 2024 après huit années au pouvoir, reste tout de même le grand perdant de la soirée, puisqu’il risque même d’être dépassé par Chega en tant que premier parti d’opposition.
Dans le Parlement sortant, la coalition au pouvoir comptait seulement deux députés de plus que les socialistes.
Croissance fulgurante de Chega
En un an, l’exécutif de M. Montenegro a pris plusieurs mesures en faveur du pouvoir d’achat, en augmentant les retraites, le salaire minimum ou en acceptant les revendications de plusieurs catégories de fonctionnaires, dont les enseignants, les médecins ou les policiers. Il a également accordé des allègements fiscaux en faveur des jeunes.
Il a par ailleurs durci la politique migratoire du précédent gouvernement socialiste d’Antonio Costa, qui était une des plus souples d’Europe.
Alors que le nombre d’étrangers vivant au Portugal a quadruplé depuis 2017, atteignant désormais environ 15 % de la population, sur 10 millions d’habitants au total, l’immigration a fait irruption dans le débat politique. Depuis sa fondation en 2019, Chega a connu une croissance fulgurante, obtenant en mars dernier 18 % des voix pour passer de douze à cinquante députés.
Son président André Ventura a vu sa campagne perturbée par deux malaises dont il a été victime devant les caméras de télévision, mais il est apparu plus en forme lorsqu’il a voté dimanche.
Afin de tirer profit des déboires du premier ministre et de l’afflux de travailleurs migrants venus d’Asie du Sud, il a martelé la rhétorique traditionnelle des partis populistes contre la corruption des élites politiques et les immigrés.