Si l’art de la défense est celui d’accommoder les restes, Me Francis Vuillemin est à n’en pas douter un excellent cuisinier. Dans une plaidoirie de près de trois heures, jeudi 20 mars, au procès des geôliers de l’organisation Etat islamique, l’avocat de Mehdi Nemmouche s’est évertué à sublimer tous les éléments du dossier, les surplus, les invendus et les ingrédients tordus, que personne n’avait osé consommer durant ces cinq semaines d’audience. Et il a réussi le tour de force de les servir, avec ses airs de garçon de café parisien, le menton haut et le verbe gouailleur, comme un plat digne des plus grandes tables.
Si personne n’avait jusqu’ici jugé opportun de cuisiner ces éléments, c’est parce qu’ils interrogent la crédibilité même des victimes de ce dossier : les quatre journalistes français, retenus en otages pendant près d’un an en Syrie, qui ont formellement identifié Mehdi Nemmouche comme étant un de leurs geôliers. Les professionnels de la justice le savent mieux que quiconque : les témoignages sont souvent contradictoires, les récits des victimes parcellaires. L’accusation en tire un récit majoritaire, et c’est à la défense de le déconstruire à partir des miettes qui sont tombées.
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