D’une courte tête, la Cour suprême américaine, à majorité conservatrice, a rétabli mercredi 5 mars une décision de justice sommant l’administration Trump de reprendre les versements dus à des organisations d’aide internationale par l’agence américaine de développement, l’Usaid, pour un montant estimé à entre 1,5 et 2 milliards de dollars.
Il s’agit de l’une des premières décisions prises par la Cour suprême contre l’administration Trump, par une courte majorité des trois juges progressistes et de deux conservateurs, dont le président de la Cour, John Roberts, contre l’avis des quatre autres conservateurs.
Le président Donald Trump a signé un décret le 20 janvier, ordonnant un gel de l’aide étrangère américaine pour quatre-vingt-dix jours. Mais un juge fédéral, Amir Ali, a suspendu, le 14 février, cette décision de geler des dépenses déjà approuvées et lui a ordonné de reprendre ces paiements avant le 27 février.
Saisie par l’administration Trump, la Cour suprême avait suspendu administrativement cette sommation quelques heures avant l’échéance, le temps de statuer sur le fond. Elle la rétablit mercredi. Soulignant que la date limite est passée, la Cour s’en remet au juge de première instance pour fixer un nouveau délai « prenant en considération la faisabilité de toute échéance pour se conformer » à sa décision initiale.
Un juge conservateur dénonce un « acte d’orgueil judiciaire »
Le juge Samuel Alito, à la tête de quatre juges conservateurs, a exprimé son désaccord, estimant qu’Amir Ali n’était pas habilité à ordonner ces paiements. M. Alito a écrit qu’il était stupéfait que la Cour récompense « un acte d’orgueil judiciaire et impose une pénalité de 2 milliards de dollars aux contribuables américains ». « Le tribunal a clairement exprimé sa frustration envers le gouvernement et les plaignants soulèvent de graves inquiétudes quant au paiement d’un travail accompli » par les organisations internationales, reconnaît-il. « Mais la solution ordonnée [par le juge de première instance] est une réponse trop extrême », estime-t-il, en référence à la sommation de payer les montants dus.
Bien que cette décision constitue une perte à court terme pour l’administration du président Donald Trump, les organisations à but non lucratif et les entreprises qui ont intenté une action en justice attendent toujours l’argent qu’elles estiment être leur dû. La semaine dernière, l’une de ces organisations a été contrainte de licencier 110 employés, selon des documents judiciaires.
L’administration Trump a annoncé il y a une semaine tailler massivement dans l’aide internationale américaine, notamment avec la suppression de 92 % des financements de programmes à l’étranger par l’agence américaine de développement, se targuant de « faire économiser près de 60 milliards de dollars aux contribuables ».
Le gel de l’aide par Donald Trump a suscité choc et émoi au sein de l’agence indépendante, créée par une loi du Congrès américain en 1961 et qui gère un budget annuel de 42,8 milliards de dollars, représentant à lui seul 42 % de l’aide humanitaire déboursée dans le monde. Le candidat républicain avait promis pendant sa campagne de réduire le poids de l’Etat fédéral et de tailler dans les dépenses, et a nommé à cette fin son allié multimilliardaire Elon Musk pour chapeauter un département de l’efficacité gouvernementale.