La star de « Mamma Mia » change de registre dans une sombre série adaptée du best-seller « Long Bright River » de Liz Moore, et disponible ce jeudi 27 mars sur Max.
Elle incarne avec force une jeune policière de Philadelphie qui traque l’auteur d’une série de meurtres de jeunes toxicomanes sans domicile.
« L’épidémie d’opioïdes est une crise permanente », note la comédienne américaine, qui analyse pour nous les thèmes majeurs de cette fiction puissante.
Le sujet la passionne tellement qu’elle commence à en parler avant même notre première question. Amanda Seyfried a fait une halte à Paris avant de filer au festival Séries Mania, à Lille, où sa nouvelle série La rivière des disparues était présentée en compétition cette semaine. Adapté du best-seller de Liz Moore Long Bright River, ce thriller à l’atmosphère trouble raconte en huit épisodes la difficile enquête menée par une jeune patrouilleuse de la police de Philadelphie. Alors que des jeunes prostituées toxicomanes et sans-abri sont retrouvées mortes les unes après les autres, Mickey Fitzpatrick tente par tous les moyens de retrouver sa sœur cadette qui vivait avec les victimes.
« Cette série est dure », prévient Amanda Seyfried, qui ne pouvait pas trouver rôle plus éloigné de ceux de Mean Girls et Mamma Mia, qui l’ont popularisée auprès du grand public. « J’ai fini par la regarder toute seule parce que je ne l’avais jamais vue en entier. J’ai été très impressionnée. Je pense que le public a beaucoup à en tirer. Mais ce n’est pas tout, c’est aussi divertissant par moments parce que nous résolvons des meurtres », nous raconte l’actrice et productrice américaine de 39 ans, lauréate d’un Emmy Award pour The Dropout et nommée aux Oscars pour Mank. Rencontre avec une grande bavarde qui s’est même essayée au français.
Long Bright River a été renommée La rivière des disparues en français. Qu’est-ce que ce léger changement dit de la série ?
Comment vous dites ? La rivière des disparues (en français dans le texte, ndlr). C’est un très beau titre. Notre série parle de femmes portées disparues, plus précisément de travailleuses du sexe qui vivent dans la rue et n’ont pas de domicile. Les policiers que nous dépeignons sont des hommes qui ne veulent pas perdre leur temps. Ils les étiquettent simplement comme des victimes d’overdose alors qu’il est assez évident, après la première autopsie, qu’il ne s’agit pas d’une overdose. Ils s’en fichent complètement alors qu’ils sont censés protéger tout le monde. Ils choisissent ceux qu’ils veulent protéger et c’est une réalité. C’est pour ça qu’on en parle, parce que ça existe. Le titre original, Long Bright River, peut signifier beaucoup de choses. Il peut évoquer ces femmes disparues, comme les veines ou littéralement la rivière qui traverse Philadelphie. Ça peut aussi être une métaphore de la perte. C’est pour ça que c’est si beau. Rien qu’avec le titre, je me suis dit : « Ok, vous m’avez eue ! Je jouerai Mickey ». Il touche à des choses qui sont très réelles.
L’histoire personnelle de Mickey Fitzpatrick se mêle à un problème majeur aux États-Unis, la crise des opioïdes…
Ce qui ressort, c’est cette dynamique familiale à laquelle tout le monde peut s’identifier. C’est un thème universel. La série met vraiment en lumière les personnes qui luttent contre l’addiction d’une manière que je n’avais jamais vue auparavant. Cette histoire en particulier aborde cette question avec beaucoup de bienveillance et de compassion à travers le personnage de Mickey, qui est très empathique. Elle a grandi dans ce quartier. Elle se soucie beaucoup de ces personnes qu’elle connaît et avec qui elle a grandi, en particulier sa sœur Kacey. L’épidémie d’opioïdes est évidemment une crise permanente et je ne connais personne qui n’ait pas été touché par elle. J’espère que ceux qui sont concernés de près ou de loin par cette crise – et ils sont nombreux – se sentiront moins seuls. Je pense que nous pouvons faire bien plus, en particulier au niveau gouvernemental en donnant aux gens la possibilité de se rétablir au lieu de les mettre de côté, ce qui est irréel. C’est vraiment irréel.
J’ai fait une ronde avec des policiers pendant quelques heures. Même si je m’ennuyais au début, la journée a pris un incroyable tournant à mi-chemin
J’ai fait une ronde avec des policiers pendant quelques heures. Même si je m’ennuyais au début, la journée a pris un incroyable tournant à mi-chemin
Amanda Seyfried
L’un de vos premiers rôles, il y a 21 ans, était celui de Lily Kane, une adolescente dont le meurtre faisait l’objet d’une enquête menée par sa meilleure amie dans la série Veronica Mars. À l’époque, est-ce que vous imaginiez qu’un jour ce serait vous qui joueriez une policière enquêtant sur des meurtres ?
J’espérais jouer un policier mais je pense qu’à l’adolescence, j’ai juste… (Elle réfléchit) Vous savez, vous choisissez des rôles que vous pensez ne pas pouvoir jouer mais vous choisissez aussi ceux qui vous sont offerts suivant les opportunités qui se présentent à vous. Je n’avais jamais eu l’opportunité de jouer un flic avant La rivière des disparues.
Pourquoi selon vous ?
Je suis toute petite et j’ai joué beaucoup de femmes vulnérables. Je ne joue pas beaucoup de personnages qui ont de l’autorité donc je crois que les gens ne pouvaient pas vraiment se projeter. Mais quand tu es acteur et que tu atteins mon âge, tu peux tout faire ou plutôt, tu veux pouvoir tout faire. On n’apprend que si on en a l’occasion. C’était ma première opportunité en tant que flic et je l’ai saisie ! Je me suis rendu compte que les flics étaient aussi des humains. Il y en a des petits, des grands, des jeunes et des vieux. C’était une idée ridicule de croire que j’avais l’air trop vulnérable ou trop agitée pour en jouer un.
Sachant que vous êtes vous-même originaire de Pennsylvanie, qu’avez-vous ressenti la première fois que vous avez enfilé cet uniforme siglé des lettres PPD, pour Philadelphia Police Department ?
Oh mon Dieu, je me suis sentie très forte. J’ai aussi ressenti un très grand respect pour ceux qui doivent revêtir cet uniforme. J’allais dire « costume » parce que c’en est un pour moi, mais c’est un uniforme. C’est comme ça qu’ils gagnent leur vie. Ils s’en sortent en mettant leurs corps et leurs esprits en danger chaque jour.
Vous êtes aussi allée sur le terrain pour vous préparer à ce rôle…
J’ai fait une ronde avec des policiers pendant quelques heures. Même si je m’ennuyais au début, la journée a pris un incroyable tournant à mi-chemin. Nous avons été confrontés à quelque chose de très traumatisant. Heureusement, ils m’ont empêchée de voir la scène dans son intégralité mais j’ai tout de suite compris ce que c’était. J’en ai un peu trop vu au début. Je me suis dit que c’était ce qu’ils voyaient tous les jours. Je voulais incarner un bon policier, l’un des gentils. Nous devons respecter les forces de l’ordre mais un grand nombre de leurs membres ne méritent pas ce respect en raison de la manière dont ils font leur travail, sans dignité ni respect pour les civils. Il y a de la nuance dans toute organisation. Elles ont leurs bons et leurs mauvais éléments. Interpréter un bon policier et enfiler cet uniforme m’a donné de la force. Je me sentais une responsabilité d’incarner ces policières que j’avais rencontrées et qui retrouvent leurs enfants chaque soir.
La rivière des disparues – 8 x 50 minutes sur Max