Bonne nouvelle : le théâtre de Jean-Luc Lagarce (1957-1995) connaît une postérité qui ne se dément pas. Mauvaise nouvelle : l’auteur ne l’a pas su, ne le saura jamais. Mort du sida à l’âge de 38 ans, le dramaturge n’a pas assisté aux multiples représentations de ses pièces. Elles ont fleuri dès 1997, sous l’impulsion d’artistes aussi divers que Stanislas Nordey, François Rancillac, Joël Jouanneau, François Berreur, Jean-Pierre Vincent, Christophe Rauck, Julie Deliquet ou encore Marcial di Fonzo Bo.
Epurée, abstraite, déclamatoire, musclée, charnelle, l’esthétique des spectacles a fluctué avec les créateurs, les époques et les modes. Mais quels que soient l’éclectisme des gestes et les approches des metteurs en scène, la langue de l’écrivain n’a jamais faibli. Reconnaissable entre toutes, elle constitue un défi de taille pour les acteurs, leur corps-à-corps avec la phrase n’étant pas négociable. Filandreuse et vertigineuse, cette phrase tâtonne et se répète, elle affine la pensée, ajuste les conjugaisons, procède par repentirs et sinuosités dans une quête insatiable du mot qui dira avec exactitude le juste sentiment.
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