Ce samedi 24 août, cela fait trente-neuf jours que la démission du gouvernement Attal a été acceptée par le président Emmanuel Macron. Le premier ministre et son équipe gèrent depuis cette date les « affaires courantes », dans l’attente d’un gouvernement issu des élections législatives des 30 juin et 7 juillet. Depuis l’avènement de la Vᵉ République en 1958, c’est la première fois que cette période de transition entre deux gouvernements dépasse neuf jours (ce record avait été établi en 1962 par le premier gouvernement Pompidou, sous la présidence de Charles de Gaulle) – même s’il est permis de compter différemment avec le vote de censure du 5 octobre 1962, comme le font remarquer nos confrères de Libération.
Cette longue période de latence est même supérieure au record de trente-huit jours établi par le gouvernement Mayer en 1953, sous la IVᵉ République – alors que la Constitution de la Vᵉ a justement été pensée pour remédier à l’instabilité de sa prédécesseure.
Réputé pour son instabilité, ce régime avait vu vingt-quatre gouvernements se succéder en douze ans (1946-1958), notamment du fait de la prédominance du Parlement dans les institutions : celui-ci contrôlait étroitement le gouvernement au sein d’une Assemblée nationale fragmentée en trois grandes forces. Le mode de scrutin à la proportionnelle (par département) contraignait les députés à former des alliances pour dégager des majorités, puis à les rompre au gré des événements politiques. Les gouvernements, qui n’avaient aucun moyen de passer outre l’Assemblée – le 49.3 n’existait pas –, étaient fréquemment renversés ou contraints de démissionner, et restaient en moyenne treize jours pour gérer les affaires courantes.
Le gouvernement Attal loin du record du monde belge
Malgré ce record, le gouvernement démissionnaire de Gabriel Attal est encore loin de pouvoir concurrencer d’autres régimes parlementaires : la Belgique a vécu 541 jours sans gouvernement de plein droit en 2010-2011, le Liban 396 jours en 2020-2021, et l’Espagne 121 jours en 2023.
En 2024, la France n’est pas seule ; nos voisins belges n’ont plus de gouvernement non plus depuis les élections législatives du 9 juin 2024, soit depuis soixante-seize jours. Comme à Paris, le gouvernement démissionnaire gère les affaires courantes du royaume, une situation qui commence pourtant à inquiéter les Belges lorsqu’il est question d’instabilité parlementaire chez leurs voisins français.