OCS – MARDI 28 JANVIER À 21 H 40 – FILM
C’est un cocktail vieux comme le cinéma que propose Baby Driver, tonique dosage de courses-poursuites, de sentiments violents, de jeunes et jolis acteurs frais émoulus de leurs premiers pop-corn movies, soutenus par quelques vieilles stars au pedigree solide, bande originale savoureuse, modelée dans un bel éclectisme pop.
Précisément, la musique est ce qui protège le jeune Baby (adorable Ansel Elgort, vu dans Nos étoiles contraires et la saga Divergente) de la violence du monde, tout en exprimant ses états d’âme. Conducteur surdoué acoquiné malgré lui avec un parrain de la mafia qui l’emploie pour des braquages de haut vol, il ne quitte jamais ses écouteurs. Ni lorsqu’il conduit et que ses playlists viennent stimuler son adrénaline. Ni lorsque au moment du partage du butin il reste en retrait des conversations de ses complices, pour mieux enregistrer leurs voix sur un de ses nombreux appareils.
Ce rapport solitaire, tendanciellement autiste, à la musique, qui donne au film un je-ne-sais-quoi très en phase avec le temps présent, rattache le personnage à son enfance − et à la mort de ses parents, sous ses yeux, dans un accident de voiture alors qu’il écoutait son iPod pour recouvrir les insultes qu’ils se lançaient au visage l’instant d’avant. Depuis, il vit avec son tuteur, un vieux sourd-muet devenu impotent, dont il s’occupe avec dévotion.
Variation ludique de « Drive »
Avec ce visage poupin que dissimulent mal ses lunettes d’aviateur, ses attitudes d’ado pas tout à fait sorti de l’enfance, Baby est un gamin. Mais un gamin surdoué, déjà arrivé au stade du vieux gangster qui s’apprête à raccrocher les gants une fois accompli son dernier tour de piste, un dernier braquage pour rembourser la dette qui le lie à son patron.
Baby Driver retourne comme un gant l’esprit de sérieux dont Drive était confit. Comme une variation tendre et ludique autour de l’œuvre qui fit la gloire, en 2011, de Nicolas Winding Refn et de son acteur Ryan Gosling. Le conducteur infaillible, mercenaire et taiseux, le coup de foudre amoureux, la musique comme aiguillon de la mise en scène, une approche de l’image très graphique, tendant parfois vers l’abstraction (les plans de San Francisco au drone sont épatants)…
Au-delà de son cool, Edgar Wright assume un romantisme brûlant qu’on ne pensait plus soluble dans le cinéma d’action américain contemporain. Mais la profusion narrative qu’il déploie semble parfois embarrasser le metteur en scène, qui ne porte pas le même soin à toutes ses scènes, à tous ses personnages. Entre la grâce de l’histoire d’amour, la simplicité émouvante de la relation entre Baby et son tuteur, d’un côté, et les intrigues pataudes qui se nouent autour des braqueurs (Jon Hamm, Jamie Foxx, Eiza Gonzalez) et de leur patron (Kevin Spacey) de l’autre, le contraste est déroutant. Cette désinvolture reflète, plus généralement, une approche plutôt superficielle de la mise en scène. Elle est aussi ce qui fait le charme, tout évanescent, de ce petit film.
Baby Driver, de Edgar Wright. Avec Ansel Elgort, Lily James, Kevin Spacey, Jon Hamm, Jamie Foxx. (EU, 2017, 113 min).