« Vous êtes souvent en tournée, vous arrive-t-il de voir vos enfants ? », interrogeait-on régulièrement Barbara Hendricks quand son fils et sa fille, aujourd’hui âgés de 43 ans et 39 ans, étaient petits. Tentée de lancer « non, je les ai eus pour que ça fasse bien sur un CV », elle répondait poliment : « Je les vois plus que vous ne l’imaginez », en se demandant pourquoi on ne posait jamais ce genre de question à ses collègues hommes. La cantatrice avait déjà senti la réprobation de son agent quand, quelques années plus tôt, elle lui avait annoncé partir s’installer à Paris avec son mari : elle faisait passer sa vie personnelle avant tout, sa carrière suivrait. « La tristesse et la solitude que j’avais senties chez Maria Callas me hantaient », écrit-elle dans son livre de mémoires Ma voie (Les Arènes, 2010).
Enceinte de Sebastian (Amadeus de son deuxième prénom), elle chantait La Flûte enchantée de Mozart aux Chorégies d’Orange. Quatre ans plus tard, elle interprétait Micaëla dans Carmen de Bizet aux mêmes Chorégies, enceinte cette fois de Jennie. Jennie comme la mezzo-soprano Jennie Tourel (1910-1973), cette bonne étoile placée sur sa route qui, lors d’un stage de chant à Aspen, dans le Colorado, encouragea la jeune boursière noire de l’Arkansas à se présenter à la Juilliard School, la prestigieuse école new-yorkaise de musique et d’art dramatique, et qui fut sa professeure de chant pendant des années.
Très jeunes, les enfants de Barbara Hendricks l’accompagnaient en tournée pendant les vacances scolaires – ils ont ainsi assisté à des répétitions dans le monde entier. Sa fille lui a aussi faxé ses problèmes de maths à l’hôtel, la chanteuse lyrique ayant fait des études de mathématiques et de chimie. A 75 ans, elle est aujourd’hui également grand-mère de cinq petits-enfants.
Quand vous êtes vous sentie mère pour la première fois ?
Toute petite, j’aimais déjà les enfants plus jeunes que moi. J’ai fait très tôt du baby-sitting. J’ai vite senti que je portais en moi cette envie d’avoir une famille. La présence des enfants m’a toujours amusée, et je trouvais que leur monde était aussi valable que celui des adultes.
Avez-vous déjà pleuré devant vos enfants ?
Oui… aux obsèques bien sûr, mais il arrivait aussi que je me mette à pleurer dans des moments de frustration ou lorsque je voulais les convaincre de quelque chose. Ces larmes stupéfiaient mes enfants. Je ne le faisais pas exprès, mais cela marchait pour calmer les choses.
La pire chose que vous ayez dite à vos enfants ?
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