Le gouvernement a livré mardi un tableau inquiétant de l’état des finances publiques, prévoyant des réductions dont il n’a pas livré pour l’heure le détail.
Invitée dans « Bonjour ! » sur TF1, la ministre des Comptes publics est revenue sur plusieurs chantiers prioritaires selon elle, notamment la question de la hausse des arrêts maladie ou encore le déficit de la Sécurité sociale.
Elle a aussi écarté toute hausse d’impôt générale, mais s’est dit favorable à mettre fin à certaines niches fiscales.
« Regarder la vérité en face. » Au lendemain d’une conférence de presse du gouvernement sur les dépenses publiques, sur lesquelles il a posé un diagnostic sombre (nouvelle fenêtre), Amélie de Montchalin est revenue ce mercredi 16 avril sur plusieurs leviers possibles d’amélioration, évoquant notamment les niches fiscales et les arrêts maladies. La ministre des Comptes publics, qui a expliqué mardi viser 6% de réduction de ces dépenses d’ici à 2029 sans recourir à « la tronçonneuse », écarte toute hausse impôt générale et souhaite que « le travail paie », a-t-elle expliqué dans « Bonjour ! », la matinale de TF1.
Des niches fiscales « qui bénéficient à moins de 100 contribuables » dans le viseur
Amélie de Montchalin a d’abord assuré qu’elle ne sera pas « la ministre qui augmentera les impôts des Français (nouvelle fenêtre), des classes moyennes, ni populaires, ni des entreprises ». « On est le pays qui a le record du monde des impôts, il faut qu’on arrête de penser que c’est comme cela qu’on va résoudre nos problèmes », a-t-elle insisté.
En revanche, elle a évoqué la question des niches fiscales (nouvelle fenêtre), autrement dit à certaines réductions d’impôts, qui sont 467 à ce jour. « On en a des dizaines qui bénéficient à moins de 100 contribuables », a relevé la ministre. Le gouvernement préfère donc « avoir des impôts potentiellement plus bas pour tout le monde, plutôt que d’avoir des impôts élevés, avec certains qui ont de très fortes réductions d’impôt », a-t-elle expliqué. Et de promettre que si de nombreuses niches sont supprimées et que l’État récupère de fortes sommes, « on fera des baisses d’impôts pour tout le monde ».
Selon elle, les niches fiscales représentent 85 milliards d’euros. « Si vous avez 10% de niches en moins, ça fait 8 milliards » d’euros récupérés, a illustré la ministre, concédant que ce chiffre « peut être un objectif ». « C’est un enjeu d’équité, de lisibilité, de justice fiscale », a-t-elle martelé. Mais quelles seront les niches précisément ciblées ? Amélie de Montchalin ne les a pas détaillées pour l’heure, mais a toutefois écarté celles dédiées aux « services à la personne » et à la « garde d’enfants ».
Les aides ne doivent pas « freiner » les gains liés au travail
La ministre a également été interrogée sur le bonus réparation (nouvelle fenêtre), dont François Bayrou a remis en doute la pertinence lors de sa conférence de presse la veille. Sans vouloir répondre sur la possible disparition de cette aide, elle a évoqué « des choses qui ne sont pas très forcément utiles, qui ne sont pas ce que les Français attendent de l’État ». Et rappelé la volonté du gouvernement de « faire une revue mission par mission, ministère par ministère », pour identifier ces « attentes ».
« Notre objectif surtout, c’est que le travail paye, qu’on ne vive pas de ces chèques temporaires et de ces aides », a insisté la ministre. « On a un problème majeur, c’est qu’il y a des gens qui disent : si je suis augmenté au travail, je vais perdre des aides. Ça, c’est un scandale », a-t-elle défendu. Face à « trop de chômage » chez les jeunes et les seniors (nouvelle fenêtre), elle a plaidé pour « un bouclier salarial » : « le travail doit toujours payer plus à la fin du mois, et les aides doivent pas être un frein à cela », a-t-elle martelé.
« Tous les sujets » sur la table pour réduire le déficit de la Sécu
Amélie de Montchalin a souligné au passage la question des arrêts maladies, sur laquelle la France creuse le fossé avec l’Allemagne selon elle. « Ceux qui travaillent et qui ont un contrat de travail ne travaillent pas moins que les Allemands, sauf qu’on a beaucoup plus d’arrêts maladies », a-t-elle expliqué. Et de préciser que ces arrêts ont augmenté « pour la facture collective de 25% depuis la fin du Covid (nouvelle fenêtre)« .
Elle est revenue à ce propos sur la proposition de la Cour des comptes des derniers jours, de moduler les remboursements de la Sécurité sociale en fonction des revenus. La veille, son collègue délégué au Commerce extérieur Laurent Saint-Martin, invité sur TF1 également, avait ouvert la porte à cette piste (nouvelle fenêtre). Sans se prononcer spécifiquement sur cette mesure, Amélie de Montchalin s’est dit prête à « regarder tous les sujets » pour diminuer le déficit de la Sécurité sociale (nouvelle fenêtre), qui atteint aujourd’hui « 22 milliards d’euros ». Car si rien n’est fait, « nous allons (la) tuer », a-t-elle mis en garde.
Elle a assuré travailler « pour que nous proposions à la fois quelque chose qui réponde aux Français sur leurs besoins de santé », tout en permettant de « revenir à l’équilibre ». « Nous allons regarder qu’est-ce qui est inefficace, du gaspillage, comment on peut répartir l’effort », a-t-elle détaillé. On veut le faire parce que sinon, la Sécurité sociale va tomber. »
Une « responsabilité collective » dans le dérapage financier
Toujours au sujet des finances publiques, Amélie de Montchalin a également évoqué le bilan d’Emmanuel Macron. En 2019, tandis qu’elle était encore députée, « nous avions remis la Sécurité sociale à l’équilibre, nous avions un déficit qui était de moins de 3% », a-t-elle assuré. « Depuis, on a eu le Covid, la guerre en Ukraine, l’inflation… », a ensuite égrené la ministre.
« Je reconnais qu’il y a certains dispositifs dont on aurait probablement dû mettre fin plus tôt », a-t-elle concédé. Mais elle a renvoyé aux réactions des oppositions à l’époque, qui demandaient selon elle des aides supplémentaires. « C’est une responsabilité collective », a-t-elle conclu. Le gouvernement appelle désormais à « regarder la vérité en face », face à un monde « instable », secoué par la « guerre commerciale » installée par Washington et la « pression de la défense ». « Soit on reste une puissance, et on regarde nos problèmes en face, soit malheureusement, c’est l’impuissance », a-t-elle défendu.