Plus que quarante-huit heures avant le vote crucial à l’Assemblée nationale sur le budget de la Sécurité sociale, et déjà, dans les différents camps, la tension est palpable. Bruno Retailleau a dénoncé « un hold-up fiscal » et appelle Les Républicains (LR) à ne pas approuver la proposition, tandis que le Rassemblement national (RN) a exhorté le premier ministre à démissionner en cas de rejet du texte.
Vendredi, le volet recettes du projet de loi de finances de la Sécurité sociale (PLFSS) a été adopté grâce à plusieurs compromis – sur la CSG, sur l’abandon de l’augmentation des franchises médicales, etc. –, mais aussi grâce aux nombreux absents dans l’hémicycle, en particulier dans les rangs du Rassemblement national.
L’adoption, mardi, de la partie consacrée aux dépenses, avec la suspension de l’emblématique réforme des retraites, puis le vote sur l’ensemble du texte s’annonce beaucoup plus incertaine, au vu des divisions jusque dans les rangs de la fragile coalition gouvernementale.
« Déni de réalité »
Deux mois après son départ fracassant du gouvernement, le patron des Républicains a qualifié, sur BFM-TV, le budget de la Sécu de « hold-up fiscal » avec l’augmentation de la CSG, de « hold-up social » sur les retraites et de « hold-up démocratique » car, à ses yeux, « jamais le pays n’a été autant à droite et jamais un gouvernement, une politique n’a été autant à gauche ». « Ce texte n’est pas votable », nos députés « auront le choix de l’abstention ou de voter contre », a-t-il asséné.
Il se retrouve ainsi sur la ligne de l’ex-premier ministre Edouard Philippe. Le maire du Havre, candidat déclaré pour 2027, a jeté un pavé dans la mare en annonçant qu’« en l’état » le groupe Horizons ne voterait pas en faveur de ce budget. Et ses troupes se sont largement abstenues vendredi sur la partie recettes.
De quoi potentiellement faire capoter l’adoption du PLFSS malgré les nombreuses concessions faites au Parti socialiste (PS). Sébastien Lecornu « s’est mis dans les mains des socialistes » avec les retraites et le renoncement à l’article 49.3, a dénoncé Bruno Retailleau. Il plaide pour un retour de cet outil constitutionnel, qui permet de faire adopter sans vote un projet de loi.
L’ancien ministre Marc Ferracci, proche d’Emmanuel Macron, a lui aussi estimé sur France 3 que le gouvernement a « trop cédé » au PS. La suspension de la réforme des retraites est « un déni de réalité », a-t-il martelé dans La Tribune Dimanche. Le résultat de mardi est donc des plus risqués pour le gouvernement.
Crainte d’une crise politique, économique et sociale
Nous serons cette fois « parfaitement nombreux et totalement présents » pour voter contre l’ensemble du projet de loi, a averti le député du Rassemblement national Jean-Philippe Tanguy, invité dans le grand Jury RTL-Public Sénat-Le Figaro-M6. Et de mettre la pression sur Sébastien Lecornu : en cas de rejet du texte, « je ne vois pas comment il ne pourrait pas démissionner ».
Une réponse à la porte-parole du gouvernement qui a estimé dans La Tribune Dimanche qu’une démission « n’aurait pas de sens ». Le premier ministre aurait sinon « engagé la responsabilité du gouvernement », en décidant finalement de recourir au 49.3 – ce qu’il se refuse toujours à faire.
Pour l’exécutif, l’heure est grave. Le ministre du travail, Jean-Pierre Farandou, a sonné l’alarme sur France 3 au sujet d’une « crise politique », « économique » et « sociale » en cas de rejet du PLFSS. Si ce dernier n’est pas adopté, le gouvernement a maintes fois prédit que le déficit de la « Sécu » plongerait autour des 30 milliards d’euros en 2026, contre 23 en 2025. De son côté, le projet de budget de l’Etat, encore plus clivant, est toujours en cours d’examen au Sénat.











