Le Parti libéral du premier ministre, Mark Carney, est donné vainqueur des législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, lundi 28 avril, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays.
Les libéraux ont toutefois échoué à obtenir la majorité absolue au Parlement canadien, fixée à 172 sièges, a annoncé la chaîne publique CBC. A 22 heures (heure de Paris), les projections des médias locaux annonçaient 169 sièges pour les libéraux, alors que le dépouillement se poursuivait dans deux dernières circonscriptions. Ils devraient toutefois être en mesure de gouverner en s’appuyant sur l’un des petits partis représentés à la Chambre basse.
Il y a quelques mois encore, la voie semblait toute tracée pour permettre aux conservateurs, emmenés par Pierre Poilievre, de revenir aux affaires, après dix ans de pouvoir de Justin Trudeau. Mais le retour de Donald Trump à la Maison Blanche et son offensive inédite contre le Canada, à coups de droits de douane et de menaces d’annexion, ont changé la donne. Lors de son discours de victoire électorale, M. Carney a appelé les Canadiens à ne jamais oublier « la trahison » américaine. « Notre ancienne relation avec les Etats-Unis est terminée » car le « président Trump tente de nous briser pour nous posséder », a-t-il également déclaré, appelant le pays à l’unité pour les « difficiles mois à venir qui exigeront des sacrifices ».
En reconnaissant sa défaite tôt mardi matin, M. Poilievre a promis de travailler avec le premier ministre libéral Mark Carney pour défendre les intérêts du Canada face aux attaques de Donald Trump. « Les conservateurs travailleront avec le premier ministre et tous les partis pour défendre les intérêts du Canada et obtenir un nouvel accord commercial qui met les droits de douane derrière nous tout en protégeant notre souveraineté », a déclaré Pierre Poilievre devant ses partisans réunis à Ottawa pour la soirée électorale.
Pour le ministre Steven Guilbeault, « les nombreuses attaques du président Trump sur l’économie canadienne, mais aussi sur notre souveraineté et notre identité même, ont vraiment mobilisé les Canadiens », a-t-il déclaré sur la chaîne publique CBC. Et les électeurs « ont vu que le premier ministre Carney avait de l’expérience sur la scène mondiale ».
A la mi-journée mardi, M. Carney a notamment reçu les félicitations du président de la République, Emmanuel Macron, lui assurant avoir « hâte d’œuvrer à [ses] côtés, de nous serrer les coudes ». « Tu incarnes un Canada fort face aux grands défis de notre temps. La France se réjouit de renforcer encore l’amitié qui unit nos pays », a ajouté M. Macron.
Les Etats-Unis ont également félicité Mark Carney pour sa victoire mardi, malgré une campagne dominée par le rejet des menaces du président Donald Trump. « Les relations entre les Etats-Unis et le Canada restent parmi les plus compréhensives au monde », a fait valoir la porte-parole du département d’Etat, Tammy Bruce, dans une première réaction officielle.
Un pays en proie à la menace américaine
A Ottawa, où les libéraux sont réunis pour la soirée électorale dans une arène de hockey, l’annonce de ces premiers résultats a provoqué une salve d’applaudissements et des cris enthousiastes. « Je suis fou de joie et il est encore tôt, mais je suis confiant que nous allons réussir à avoir une majorité », a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP), David Lametti, ancien ministre de la justice.
A 60 ans, Mark Carney, novice en politique mais économiste reconnu, a su convaincre une population inquiète pour l’avenir économique et souverain du pays qu’il était la bonne personne pour piloter le pays en ces temps troublés.
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Cet ancien gouverneur de la Banque du Canada et de la Banque d’Angleterre, des institutions monétaires, n’a cessé de rappeler pendant la campagne que la menace américaine est réelle. « Ils veulent nos ressources, notre eau. Les Américains veulent notre pays », a-t-il prévenu. « Le chaos est entré dans nos vies. C’est une tragédie, mais c’est aussi une réalité. La question-clé de cette élection est de savoir qui est le mieux placé pour s’opposer au président Donald Trump ? », a-t-il expliqué.
Pour faire face, il a promis de maintenir des droits de douane sur les produits américains tant que les mesures prises en la matière par Washington seront en place, mais aussi de développer le commerce au sein de son pays en levant les barrières douanières entre les provinces et en cherchant de nouveaux débouchés, notamment en Europe.
En face, le chef des conservateurs, qui avait promis des baisses d’impôts et des coupes dans les dépenses publiques, n’a pas réussi à convaincre les électeurs de ce pays du G7, neuvième puissance mondiale, de tourner le dos aux libéraux. Jusqu’au bout, Pierre Poilievre aura souffert de la proximité, de par son style et du fait de certaines de ses idées, avec le président américain, ce qui lui a aliéné une partie de l’électorat, selon les analystes.