La startup franco-allemande a annoncé lundi avoir levé 150 millions d’euros.
Fondée en 2021, elle développe un vaisseau spatial qui devrait voler en 2028.
L’Europe va (enfin) se doter d’un taxi spatial pour éviter à ses astronautes de faire de l’auto-stop. La startup The Exploration Company a annoncé lundi avoir levé 150 millions d’euros pour développer et construire son vaisseau spatial Nyx. « Ce financement porte le total des fonds levés par TEC à plus de 216 millions d’euros […]. Ils serviront à développer et à tester le vaisseau Nyx, à renforcer l’équipe qui compte déjà 200 personnes et à augmenter la capacité de production de l’entreprise« , a déclaré l’entreprise dans un communiqué.
La jeune pousse franco-allemande a été sélectionnée en mai dernier par l’Agence spatiale européenne (ESA) pour développer un service de transport cargo vers la Station spatiale internationale d’ici à 2028, un premier pas pour que l’Europe soit un jour capable d’envoyer elle-même des humains dans l’espace. Confrontée à une concurrence internationale de plus en plus féroce, l’ESA souhaite acheter des services spatiaux à des industriels sur le modèle de la Nasa, plutôt que de développer elle-même des programmes. Objectif : aller plus vite et réduire les coûts.
Des anciens d’Airbus et d’Arianespace
C’est la première entreprise européenne à avoir signé un contrat commercial avec la Nasa . The Exploration Company a été fondée en 2021 par Hélène Huby, qui a travaillé avant chez Airbus et Arianespace. La Directrice générale s’est entourée d’une équipe d’ingénieurs qui avaient travaillé ensemble sur les programmes spatiaux européens les plus complexes. La société opère depuis l’Allemagne et la France, et possède des bureaux à Houston aux États-Unis.
L’accord signé en mai dernier avec l’ESA – pour un montant de 25 millions de dollars – est le deuxième plus gros contrat de la société après celui remporté en 2023 avec l’américain Axiom Space pour livrer du fret à sa future station spatiale privée. En plus d’investisseurs privés, ce nouveau tour de table intègre des capitaux publics via le fonds French Tech Souveraineté français et le DeepTech & Climate Fonds allemand. Aujourd’hui, l’économie spatiale repose sur des partenariats public-privé.
Nyx, un vaisseau-cargo européen
Depuis les débuts de l’exploration spatiale, seule une poignée de vaisseaux ont eu l’honneur de transporter des humains. Et jusqu’à présent, l’Europe a toujours été contrainte de faire de l’auto-stop pour envoyer ses astronautes dans l’espace, mais plus pour longtemps. Le vaisseau spatial Nyx sera réutilisable et rechargeable en orbite, à l’instar de capsule Dragon de SpaceX. Il pourra être lancé à l’aide de n’importe quel lanceur lourd et s’amarrer à n’importe quelle station spatiale.
D’après son concepteur, ce cargo-spatial est capable de rapporter sur Terre « jusqu’à 3000 kg de fret« , soit « la plus grande masse descendante disponible dans le monde« . La jeune pousse franco-allemande promet un coût « inférieur de 25 à 50% » à celui des autres véhicules spatiaux. Fin 2023, la société a annoncé vouloir développer un moteur-fusée de la même catégorie que le Raptor de SpaceX, de quoi doter l’Europe d’un lanceur super lourd.
Le premier vol du démonstrateur à grande échelle est prévu pour 2026. Un premier prototype en modèle réduit s’est déjà envolé en juillet dernier à bord de la fusée Ariane 6 . La société prévoit d’en envoyer un deuxième de plus grande taille en 2025 et le démonstrateur final en 2026. Si tout se passe bien, le vaisseau-cargo européen devrait effectuer sa première livraison de fret à l’ISS au cours de l’année 2028. Dans un second temps, il sera également en mesure de transporter des humains.
Maintenir l’Europe sur l’échiquier spatial
Les avancées technologiques telles que les fusées réutilisables et les véhicules spatiaux rechargeables en orbite rendent l’espace plus accessible. Plusieurs nouvelles stations spatiales sont en cours de construction autour de la Terre et de la Lune, et le marché du transport pour atteindre ces nouvelles destinations passera [de 5] à 300 milliards de dollars au cours des dix prochaines années.
Un changement d’ère qui doit maintenir l’Europe dans la course face à la montée en puissance des États-Unis et de la Chine, qui investissent massivement dans l’espace (le budget de la Nasa est cinq fois supérieur à celui de l’Esa), mais aussi celle des pays émergents comme l’Inde. Une Europe spatiale forte passe d’abord par un accès autonome à l’espace, d’où la nécessite de se doter de son propre véhicule spatial.