La douleur est entrée d’un coup dans la salle d’audience, poignante, palpable, apprivoisée par trente-cinq ans de souffrance mais toujours là, et la colère aussi, avec calme et une infinie dignité. Les familles des victimes, qui ont perdu un père, un frère, un mari dans le vol UTA 772 ont calmement témoigné de leur deuil impossible, jeudi 23 janvier, devant le tribunal de Paris, après l’attentat qui a coûté la vie à 170 personnes de 18 nationalités, dont 54 Français. Nicolas Sarkozy et les autres prévenus du procès pour les soupçons de financement libyen de la campagne présidentielle de 2007, ont écouté sans un mot, pâles, blêmes, ce flot de vies sacrifiées.
La famille Klein a parlé la première. « Mon frère Jean-Pierre est mort, ce 19 septembre 1989, a dit doucement Danièle. C’était un comédien, un metteur en scène, féru de théâtre, reçu à 18 ans au Conservatoire national, sans même le bac. Quand il quittait une pièce, la lumière baissait d’un cran. » François Truffaut avait remarqué le jeune homme, qui a eu un rôle dans Le Dernier métro. Il avait passé deux mois au Congo-Brazzaville pour monter une pièce sur un dictateur fou qui dévorait son peuple. « La première de la pièce, sans lui, était baignée de larmes. » Les Klein sont une famille juive, non religieuse, rescapée de la Shoah, très fière d’être de la lignée de Léon Blum.
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