Les petites flaques se font de plus en plus nombreuses et de plus en plus larges, jusqu’à ce que l’on ne puisse plus distinguer la limite de l’eau et de la terre. Même du ciel, le regard ne peut cerner les contours précis du lac Tchad, seulement tenter de déchiffrer les formes tracées par ses langues de sable ponctuées d’îlots verts et plats comme des nymphéas géants.
Lundi 30 juin, le Cessna 208B Caravan (un petit avion à hélice) des Nations unies s’arrache une dernière fois à la poussière de Bol, chef-lieu de la province du Lac, au Tchad. Après sept années à transporter les personnels des ONG sur la zone, la liaison est interrompue faute de financements. Les principaux donateurs – en premier lieu les Etats-Unis – ont drastiquement réduit leur aide. Les agences des Nations unies estiment qu’elles vont perdre deux tiers de leurs financements pour le Tchad en 2025 par rapport à l’année précédente. Les moyens restants sont redirigés vers d’autres crises et le lac sombre dans l’oubli.
Dix ans plus tôt, la région faisait pourtant la une des médias. Les Occidentaux découvrent alors la brutalité de la secte islamiste Boko Haram : attentats suicides perpétrés par des enfants, décapitations filmées, viols et enlèvements de masse. Le rapt des lycéennes de Chibok (Nigeria), en 2014, provoque une émotion internationale, matérialisée par la campagne en ligne #BringBackOurGirls, à la résonance planétaire. Dans un contexte de prise de conscience des enjeux climatiques, ONG et responsables politiques n’hésitent pas à faire le lien entre l’insécurité qui règne dans la région et l’assèchement du lac, qui a perdu 90 % de sa superficie entre les années 1960 et 1990, s’inquiétant d’une possible disparition de ce milieu naturel.
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