Les « guerres culturelles » américaines s’invitent dans la gestion des catastrophes aériennes de Boeing. Un juge fédéral du Texas a rejeté, jeudi 5 décembre, un compromis de plaider-coupable entre l’avionneur américain et le ministère de la justice, faisant suite aux crashs de 2018 et 2019 de deux 737 MAX 8 ayant causé la mort de 346 personnes. Cet accord prévoyait une amende de 243 millions de dollars (230 millions d’euros), l’engagement par Boeing de réaliser 455 millions d’investissements dans des mesures de sécurité et la nomination d’un contrôleur pour trois ans.
Le juge Reed O’Connor ne s’oppose pas aux montants prévus, mais à d’éventuels critères dits « DEI » – pour diversité, équité, inclusion – dans le choix du contrôleur. « La Cour n’est pas convaincue que le gouvernement ne choisira pas un contrôleur sans considérations raciales et n’agira donc pas de manière non discriminatoire. Dans une affaire de cette ampleur, il est dans l’intérêt suprême de la justice que le public soit convaincu que la sélection de ce contrôleur se fera uniquement sur la base de ses compétences. Les efforts déployés par les parties en matière de DEI ne servent qu’à saper cette confiance », accuse le magistrat, un conservateur nommé par le président républicain George W. Bush.
Il appartenait en effet au gouvernement fédéral – après appel à candidatures – de désigner et de superviser ce contrôleur, en général un cabinet d’avocats ou de conseil. Boeing devait être consulté – avec droit de veto sur un des six candidats proposés par le ministère –, mais pas le tribunal. Le juge n’a fait confiance ni à Boeing, craignant qu’il exerce son droit de veto « d’une manière discriminatoire et avec des considérations raciales », ni au gouvernement, se disant « sceptique » face aux assurances que le superviseur serait choisi « uniquement en fonction du mérite et du talent ».
Grave vice de construction
Les familles des victimes s’étaient opposées aux considérations du DEI et avaient demandé au juge O’Connor de bloquer l’accord conclu cet été, affirmant qu’il était trop indulgent envers l’entreprise. « Nous prévoyons une renégociation importante de l’accord de plaider-coupable, pour intégrer des conditions véritablement proportionnées à la gravité des crimes de Boeing, a déclaré Erin Applebaum, avocate d’une famille de victime. Il est temps que le ministère de la justice mette fin à son traitement indulgent envers Boeing et demande réellement des comptes. » Le juge a donné trente jours aux parties pour indiquer comment elles comptaient procéder dans cette affaire interminable.
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