Le premier ministre de l’entité serbe de Bosnie, Radovan Viskovic, a démissionné, lundi 18 août, ouvrant la voie à la formation d’un gouvernement d’« union nationale », en pleine crise due au procès contre le chef politique des Serbes de Bosnie, Milorad Dodik, qui a une nouvelle fois brandi la menace d’un « référendum d’indépendance ».
Une cour d’appel de Sarajevo, saisie par un avocat de Milorad Dodik, a confirmé lundi la décision formelle de la Commission électorale bosnienne de déchoir de son mandat le président de la Republika Srpska (RS, entité serbe de la République de Bosnie-Herzégovine).
Milorad Dodik, 66 ans, qui dirige sans discontinuer la RS depuis 2006, avait été condamné le 1er août, en appel, par un tribunal de Sarajevo à un an de prison et à six ans d’inéligibilité – un jugement auquel il refuse de se soumettre. Il a été reconnu coupable du non-respect des décisions du haut représentant international, Christian Schmidt, qui est chargé de faire respecter l’accord de paix dans le pays signé il y a près de trente ans. Milorad Dodik est le premier dirigeant bosnien condamné pour cette infraction, nouvelle depuis la modification en 2023 du code pénal bosnien par le haut représentant.
Refus des partis d’opposition
Dans la foulée de l’annonce du jugement en appel, Milorad Dodik avait appelé à la formation d’un gouvernement d’« union nationale » pour répondre de « façon politique » à son procès, mené, selon lui, avec l’objectif de l’« éliminer de la vie politique ».
« Nous avons décidé d’élire un nouveau gouvernement en Republika Srpska », a déclaré aux médias Radovan Viskovic, premier ministre de l’entité serbe visé depuis 2023 par des sanctions américaines pour avoir sapé l’accord de paix de Dayton par ses actions politiques. Lui-même ne fera pas partie de ce nouveau gouvernement.
S’exprimant à Banja Luka, dans le nord du pays, chef-lieu de la RS, aux côtés du président, Radovan Viskovic, en poste depuis 2018, a expliqué que son départ était sa « contribution » à la mise en place d’« un consensus plus large en RS ». Les partis d’opposition en RS ont refusé l’appel à rejoindre un gouvernement d’« union nationale ». « Nous sommes unis et nous continuons à y travailler. C’est un moment crucial pour nous », a déclaré Milorad Dodik lundi, en annonçant un cabinet « consolidé » et « capable de répondre aux défis ».
Annonce d’un référendum
La Bosnie est divisée en deux entités, la RS et la Fédération de Bosnie-Herzégovine, reliées par un gouvernement central. La Commission électorale doit maintenant convoquer des élections anticipées, qui doivent avoir lieu d’ici 90 jours, pour élire un nouveau président de l’entité.
Milorad Dodik a évité de purger sa peine de prison en la convertissant en jours-amende, en payant environ 19 000 euros. Il a déjà fait savoir début août qu’il n’abandonnerait pas sa position de président de l’entité serbe, et annoncé la tenue d’un référendum pour demander aux habitants de la RS s’il devait ou non se retirer après la décision de la justice. Il a précisé lundi que ce référendum serait organisé fin septembre, mais aussi qu’il ne permettrait pas l’organisation d’un scrutin en RS pour élire son successeur.
Et il a à nouveau évoqué l’éventualité d’un « référendum d’indépendance » de la RS, « au plus tard 90 jours » après le premier référendum, à défaut d’une discussion sur l’autonomie de l’entité serbe, selon lui réduite par les nombreuses réformes visant à renforcer l’Etat central adoptées après la guerre (1992-1995).